Print Friendly, PDF & Email

Daniela DINCĂ

Le lexique roumain de la pandémie de COVID-19 dans la communication institutionnelle

 

Daniela Dincă
Université de Craiova, Roumanie
danadinca@yahoo.fr


Résumé

Dans cet article, nous proposons une analyse sémantico-syntaxique du lexique de la pandémie de COVID-19 dans la perspective traductologique français-roumain afin de voir dans quelle mesure les nouveaux termes de la pandémie de COVID-19 réussissent à s’intégrer dans la chaine discursive, illustrant ainsi les traits définitoires du discours juridique marqué par la concision et la clarté. En fait, ce qui nous intéresse, c’est le comportement morphosyntaxique des termes reliés à la pandémie de COVID-19 dans la traduction institutionnelle dont le principal objectif est celui de la transmission des connaissances spécialisées, de grand intérêt pour tous les citoyens de l’Union européenne.

Abstract

The Romanian lexicon of the COVID-19 pandemic in institutional communication

In this article, we propose a semantic-syntactic analysis of the COVID-19 pandemic lexicon from the French-Romanian translational perspective in order to see to what extent the new terms of the COVID-19 pandemic manage to fit into the discourse chain, thus illustrating the defining features of legal discourse marked by conciseness and clarity. In fact, what interests us is the morphosyntactic behaviour of the terms related to the COVID-19 pandemic in institutional translation, whose main objective is the transmission of specialised knowledge, of great interest to all citizens of the European Union.


.

1. Introduction[1]

 

Dans un monde qui vit de profondes mutations sous l’effet de la globalisation, la prolifération de la pandémie de COVID-19 a accéléré la révolution technologique dans des domaines très divers de l’activité humaine et, notamment, dans le domaine de la traduction institutionnelle, qui est toujours à la quête des mots justes pour exprimer le sens approprié et faire passer le message du texte de départ (langue source) dans le texte d’arrivée (langue cible).

Notre contribution se veut une réflexion sur le lexique de la pandémie de COVID-19 dans une perspective contrastive français-roumain par l’analyse des documents officiels de l’Union européenne concernant la gestion de cette nouvelle crise sanitaire et humanitaire. En fait, nous proposons une analyse du lexique roumain de la pandémie de COVID-19 dans un corpus parallèle français-roumain qui nous permettra de dégager les procédés de l’intégration sémantico-syntaxique des termes dans les documents de référence, comme c’est le cas des documents officiels de l’Union européenne pour la gestion de la pandémie de COVID-19. En effet, la nécessité de traduire les règlements de l’Union européenne dans les langues de tous les états membres[2] est mise en relation avec l’importance accordée au citoyen : « L’intérêt des citoyens doit prévaloir sur les difficultés et les coûts qui résultent de la nécessité de permettre à chaque personne de s’adresser aux institutions dans sa propre langue et de recevoir une réponse dans la même langue » (FERRERI 2016 : 94).

Dans le cadre de cette analyse contrastive, nous adoptons la perspective de la traductologie de corpus (LOOCK 2016) afin d’étudier l’intégration sémantico-syntaxique des principaux termes relevant de la gestion de la pandémie de COVID-19. Pour l’analyse sémantico-syntaxique, nous avons emprunté la vision contrastive sur « l’approche linguistique des problèmes de traduction » de Chuquet et Paillard (1989), plus précisément les procédés de transposition et de modulation. À cela s’ajoute la dimension jurilinguistique (CORNU 1990) propre aux documents normatifs concernés, qui ont été traduits dans toutes les langues de l’UE, ce qui a conduit vers l’émergence de nouveaux termes en roumain et surtout vers la nécessité de leur intégration syntaxique au niveau discursif.

Le corpus parallèle français-roumain utilisé regroupe deux règlements de date récente :

(1) R 2021/953­ (Règlement (UE) 2021/953 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2021 relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation de certificats COVID-19 interopérables de vaccination, de test et de rétablissement (certificat COVID numérique de l’UE) afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de COVID-19) ;

(2) R 2020/1042 (Règlement (UE) 2020/1042 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2020 fixant des mesures temporaires concernant les délais applicables aux phases de collecte, de vérification et d’examen prévues dans le règlement (UE) 2019/788 relatif à l’initiative citoyenne européenne en raison de la propagation de la COVID-1).

 2. Analyse sémantico-syntaxique des termes de la pandémie de COVID-19

 

Les termes qui font l’objet de notre analyse sont des termes simples, dérivés ou composés : fr. pandémie / roum. pandemie (61 occurrences dans les deux langues), fr. épidémie / roum. epidemie (5 occurrences uniquement en roumain), fr. épidémiologique / roum. epidemiologic (10 occurrences dans les deux langues), fr. (auto)confinement / roum. (auto)izolare (11 occurrences), auxquels s’ajoutent les deux acronymes : COVID-19 (53 occurrences dans les deux langues) et SARS-COV-2 (61 occurrences).

 2.1. Termes simples, dérivés ou composés

Le terme pandémie est utilisé dans les deux langues pour désigner l’infection de « la quasi-totalité de la population d’un continent ou de plusieurs continents, voire qui s’étend à la quasi-totalité d’une population d’un continent ou de plusieurs continents, voire dans certains cas de la planète »[3]. Dans toutes ses occurrences, le terme pandémie est relié à l’acronyme COVID-19 par la même préposition de dans les deux langues : fr. « pandémie de COVID-19 » et roum. « pandemia de COVID-19 ».

Comme on peut le constater, le terme pandémie peut apparaitre seul dans le corpus, ayant le même équivalent dans la langue roumaine :

En ce qui concerne la différence sémantique entre épidémie et pandémie, elle réside dans « une question d’ampleur » :

À son entrée dans le dictionnaire français, en 1752, le mot pandémie était considéré comme un synonyme d’épidémie. Aujourd’hui, les deux termes sont utilisés pour qualifier des phénomènes distincts. D’après le Larousse, une épidémie est « le développement et la propagation rapide d’une maladie contagieuse, le plus souvent d’origine infectieuse, dans une population ». Quant à elle, la pandémie est « une épidémie étendue à toute la population d’un continent, voire au monde entier ». Tout est donc une question d’ampleur. (DELUZARCHE 2020)

Malgré la différence sémantique entre les deux termes, la version roumaine utilise le terme epidemie (fr. épidémie) dans plusieurs contextes pour traduire les groupes nominaux renvoyant à la manifestation de la COVID-19 : « la flambée de COVID-19 », « une nouvelle flambée de COVID-19 », « la propagation de la COVID-19 » :

 

On assiste dans ce cas à une « modulation métonymique », définie par Chuquet et Paillard (1989) comme « un déplacement de sens par contigüité », le roumain privilégiant la cause pour la conséquence : fr. « la flambée de COVID-19 » / roum. « epidemia de COVID-19 » (trad. litt. « épidémie de COVID-19 ») ; fr. « une nouvelle flambée de COVID-19 »/ roum. « o nouă izbucnire a epidemiei de COVID-19 » (trad. litt. « un nouvel éclatement de l’épidémie de COVID-19 ») ; fr. « la propagation de la COVID-19 » / roum. « epidemia de COVID-19 » (trad. litt. « l’épidémie de COVID-19 »).

Dans la même famille lexicale, on retrouve l’adjectif dérivé épidémiologique qui apparait dans l’environnement syntaxique suivant :

Dans tous ces cas, on constate le calque sur le groupe nominal français : fr. « situation épidémiologique » / roum. « situația epidemiologică », fr. « études épidémiologiques » / roum. « studii epidemiologice », fr. « données épidémiologiques » / roum. « date epidemiologice », fr. « urgences épidémiologiques » / roum. « urgențe epidemiologice ».

L’apparition de la pandémie a fait émerger de nouvelles acceptions pour des termes existants dans la langue, comme c’est le cas pour confinement et sa variante autoconfinement :

 

Quant à son emploi, les spécialistes attirent l’attention sur deux faits : d’une part, il y a une divergence sémantique entre le nom confinement et le verbe confiner :

Si le confinement prend rapidement pour sens l’enfermement (avec une inscription dans le vocabulaire du droit pénal) et l’isolement (notamment des prisonnier·e·s, et plus tardivement, celui des malades), il est intéressant de noter que le verbe confiner, dans ses différentes acceptions, touche aux deux sens de la limite la restriction, la claustration, mais aussi la limite-frontière, le tout-contre, la proximité, notamment dans sa forme transitive indirecte, confiner à. (COLOMBE, SALCEDO 2021)

et, d’autre part, le nom enregistre un usage controversé :

Or, dans le confinement imposé par l’état d’urgence sanitaire, le sens supporte l’inversion et la contradiction : il s’agit d’enrayer l’épidémie, et de se confiner y compris en l’absence de symptômes, ou lorsqu’on peut apporter la preuve d’une non-contamination. Sont confinées les « sains » comme les « malades », avec un soupçon de contagion généralisé, un brouillage entre souci de soi et souci des autres. (COLOMBE, SALCEDO 2021)

En plus, Thiéry-Riboulot (2020) souligne la polysémie du terme lors de l’éclatement de la pandémie de COVID-19 (la période entre le 16 mars et le 11 mai 2020) par rapport à son emploi courant pour désigner une certaine période de temps :

L’émergence d’une nouvelle référence historique s’est accompagnée en France d’un nouveau référencement lexical dont il sera intéressant d’observer l’avenir. En mars et avril 2020, le mot a été polysémique puisqu’il référait aussi bien aux mesures prises (« le confinement oblige à… »), à la situation des territoires (« le confinement de la Lombardie »), à celle des personne (« mon confinement se passe bien »), ou à la période (« pendant le confinement »). Cependant, dès mai 2020, la polysémie s’est réduite, et c’est la période qui s’étend du 16 mars au 11 mai 2020 que le mot réfère le plus fréquemment et l’on dit « pendant le confinement » comme on dit « pendant la guerre » ou « sous l’occupation. (THIERY-RIBOULOT 2020 : 145)

Pour la langue roumaine, on constate que le traducteur a adopté deux solutions de traduction : (1) l’emploi du terme roumain izolare (fr. « isolement ») ou (2) la présence d’une périphrase explicative « măsuri de limitare a mișcării persoanelor » (trad. litt. « mesures pour limiter la circulation des personnes »). Dans le premier cas, il s’agit d’une « modulation métonymique par contigüité » (Chuquet et Paillard 1989) qui consiste à remplacer le résultat (confinement) par le processus (isolement). Le même changement de perspective apparait dans le deuxième cas expliqué par le procédé de « traduction descriptive » définie par Harvey dans les termes suivants :

Cette technique consiste à expliquer les spécificités culturelles en utilisant des termes génériques. Ainsi, la trilogie contraventions, délits, crimes est rendue par minor offences, major offences and serious crimes […] ou par minor infringements, intermediate offences and serious crimes […]. Il s’agit en fait d’une glose suffisamment concise pour fonctionner en autonomie. (HARVEY 2002 : 46)

En somme, pour résumer le comportement sémantico-syntaxique des termes analysés dans cette première partie, on peut affirmer que la langue roumaine calque les groupes nominaux français (fr « pandémie de COVID-19 » / roum. « pandemia de COVID-19 », fr. « situation épidémiologique » / roum. « situația epidemiologică »), mais elle fait aussi appel à la modulation métonymique dans la traduction de deux termes : la propagation (fr. « la propagation de la COVID-19 » / roum. « epidemia de COVID-19 », trad. litt. « l’épidémie de COVID-19 ») et l’(auto)confinement (fr. « (auto)confinement / roum. « (auto)izolare », trad. litt. « (auto)isolement »). À tout cela s’ajoute la traduction descriptive pour le groupe nominal « mesures de confinement » traduit par « măsuri de limitare a mișcării persoanelor » (trad. litt. « mesures pour limiter la circulation des personnes ») afin de rendre explicite le sens contextuel du terme confinement.

2.2. Le comportement syntaxique des acronymes COVID-19 et SARS-COV-2

 Dans les lignes qui suivent, nous analyserons le comportement syntaxique des principaux acronymes de la pandémie actuelle (COVID-19 et SARS-COV-2) en tant que déterminants du groupe nominal afin d’illustrer les cas de modulation grammaticale définie par Chuquet et Paillard (1989 : 33) dans les termes suivants : « tout décalage grammatical entre les deux langues est une modulation, un changement de point de vue plus systématique et contraignant dans ce cas ».

Avec sa valeur qualifiante, l’acronyme COVID-19 est relié au nom centre par la préposition de dans les deux langues : fr. « la pandémie de COVID-19 », roum. « pandemia de COVID-19 » :

Dans l’exemple ci-dessus, on retrouve le terme français dans la construction V+COD : « diagnostiquer la COVID-19 » où l’acronyme COVID-19  est de genre féminin[4]. Dans la langue roumaine, par transposition, la construction verbale est remplacée par une structure nominale où l’objet sur lequel porte l’action du verbe est rendu par un déterminant relié directement au nom : « diagnosticarea COVID-19 » (trad. litt. « le diagnostic COVID-19 »), ce qui pose le problème de l’incidence de COVID-19 par rapport au nom centre : coordination ou subordination.

La même structure prépositionnelle apparait en français si l’acronyme est inclus dans une structure possessive construite avec la préposition de :

En revanche, dans la traduction des groupes nominaux français : fr. « tests de dépistage de la COVID-19 » / roum. « teste pentru depistarea COVID-19 » (trad. litt. « tests pour le dépistage COVID-19 ») et fr. « le diagnostic de la COVID-19 » / roum. « depistarea COVID-19 » (trad. litt. « le dépistage COVID-19 »), la langue roumaine privilégie la structure [N+N], même si, syntaxiquement, l’acronyme COVID-19 se trouve dans un rapport de subordination avec le nom déterminé.

En fonction de la relation que l’acronyme COVID-19 établit formellement avec le nom déterminé, nous avons identifié deux types de groupes nominaux construits autour des noms certificat et test qui viennent renforcer l’hypothèse que la langue française manifeste une tendance vers le figement [N+N] même si, en fait, les deux termes se trouvent dans une relation de subordination :

Dans les textes roumains, on constate que la structure « certificat COVID-19 » explicite, dans tous les exemples, la relation entre les deux termes par la présence d’une préposition.

Dans le premier exemple, les deux dénominations françaises pour les certificats obtenus après la vaccination, en version longue ou courte : « certificats COVID-19 » ou « certificat COVID », laissent les autres déterminants du nom s’enchaîner après les deux acronymes : « certificats COVID-19 interopérables de vaccination, de test et de rétablissement (certificat COVID numérique de l’UE) ». En effet, l’association des deux termes, certificat et COVID-19, conduit à la création d’un nom composé, les deux termes se situant sur le même plan syntaxique. En revanche, la langue roumaine place la dénomination du certificat à la fin du syntagme nominal, ce qui implique la présence d’un élément de relation – une préposition différente dans les deux exemples : roum. « certificatelor interoperabile de vaccinare, testare și vindecare de COVID-19 (certificatul digital al UE privind COVID) » (trad. litt. « certificats interopérables de vaccination, de test et de rétablissement de COVID-19 (certificat numérique de l’UE concernant COVID »).

Dans le deuxième exemple, les groupes nominaux français « certificats COVID-19 interopérables », « certificats COVID-19 contrefaits » gardent la même unité par rapport à la langue roumaine qui utilise la préposition explicative concernant : fr. « certificats COVID-19 interopérables » / roum. « certificatelor interoperabile privind COVID-19 » (trad. litt. « certificats interopérables concernant COVID-19 », fr. « certificats COVID-19 contrefaits » / roum. « certificatelor privind COVID-19 contrafăcute» (trad.litt. « certificats concernant COVID-19 contrefaits ».

Le troisième cas met en évidence la même tendance de la langue française d’utiliser le terme COVID-19 auprès du nom, sans aucun élément de relation, même si, entre le nom centre et l’acronyme COVID-19, il y a un complément du nom : « certificats de vaccination COVID-19 ».  D’autre part, la langue roumaine enregistre le même comportement syntaxique par l’emploi d’une préposition explicative : « certificate de vaccinare împotriva COVID-19 » (trad. litt. « certificats de vaccination contre COVID-19 »).

La même tendance de la langue française d’utiliser la structure [N+N] s’enregistre dans le cas du groupe nominal « test COVID-19 » qui, en roumain, est rendu par l’introduction d’une périphrase explicative – « un test pentru depistarea COVID-19 » (trad. litt. « un test pour la détection COVID-19 ») :

Mais, dans le cas du terme vaccin, on constate que les deux langues construisent des structures explicatives avec des prépositions, la seule différence résidant dans l’impossibilité de la langue roumaine d’utiliser l’article défini après la préposition[5] – fr. « vaccins contre la COVID-19 » / roum. « vaccinuri împotriva COVID-19 » (trad. litt. « vaccins contre COVID-19 ») :

Pour résumer le comportement syntaxique de l’acronyme COVID-19 dans le groupe nominal français, on constate que les structures les plus récurrentes peuvent être divisées en deux sous-classes :

  1. structures formées par juxtaposition [N+N] : « test COVID-19 », « certificats COVID-19 », « certificat COVID », « certificats de vaccination COVID-19 » ;
  2. structures construites avec des prépositions : « dépistage de la COVID-19 », « diagnostic de la COVID-19 », « vaccins contre la COVID-19 ».

Au contraire, en roumain, on constate un phénomène inversé :

  1. une tendance d’utiliser des structures construites avec des prépositions : « un test pentru depistarea COVID-19 » (trad. litt. « un test pour la détection COVID-19 »), « testelor pentru COVID-19 » (trad. litt. « un test pour COVID-19 », « vaccinuri împotriva COVID-19 » (trad. litt. « vaccins contre COVID-19 »), « certificate de vaccinare împotriva COVID-19 » (trad. litt. « certificats de vaccination contre COVID-19 », « certificatelor interoperabile de vaccinare, testare și vindecare de COVID-19 (certificatul digital al UE privind COVID) » (trad. litt. « certificats interopérables de vaccination, de test et de rétablissement de COVID-19 (certificat numérique de l’UE concernant COVID ») ;
  2. la juxtaposition des deux termes apparait dans un seul cas : « depistarea COVID-19 » (trad. litt. « le diagnostic COVID-19 »).

En ce qui concerne le deuxième acronyme SARS-CoV-2[6], nous résumons ses occurrences dans trois cas de figures qui mettent en évidence un comportement diffèrent par rapport à l’acronyme analysé supra :

(1) dans le premier cas, fr. « la propagation du SARS-CoV-2 » / roum. « răspândirea SARS-CoV-2 » (trad. litt. « la propagation SARS-CoV-2) », fr. « la présence de l’acide ribonucléique (ARN) du SARS-CoV-2 » / roum. « prezența acidului ribonucleic (ARN) SARS-CoV-2 » (trad. litt. « la présence de l’acide ribonucléique (ARN) SARS-CoV-2 »), le génitif français est remplacé en roumain par une structure [N+N] où l’acronyme SARS-CoV-2 s’associe au nom déterminé (la propagation, acide ribonucléique) sans aucun élément de relation.

 (2) Dans le deuxième cas, l’acronyme SARS-CoV-2 appelle, dans les deux langues, une préposition qui assure sa subordination par rapport au nom centre : fr. « l’infection par le SARS-CoV-2 » / roum. « infecției cu SARS-CoV-2 » (trad. litt. « infection avec SARS-CoV-2 »), fr « des anticorps contre le SARS-CoV-2 » / roum. « anticorpi împotriva SARS-CoV-2 » (trad. litt. « anticorps contre SARS-CoV-2 »). Comme on peut le constater, la seule divergence de construction entre les deux langues relève de la présence de l’article avec préposition en français tandis que l’emploi d’une préposition devant le nom exclut la présence de l’article défini en roumain :

(3) Dans le troisième cas, le contexte syntaxique permet la présence de l’article devant l’acronyme SARS-CoV-2 en roumain. Il s’agit de l’utilisation de l’adjectif nouveaux dans le groupe nominal qui rend possible l’emploi de l’article possessif / génitival : fr. « de nouveaux variants préoccupants du SARS-CoV-2 » / roum. « noi variante ale SARS-CoV-2 » (trad. litt. « nouveaux variants de SARS-CoV-2 ») :

En fin de compte, on peut remarquer que le comportement syntaxique des deux acronymes COVID-19 et SARS-CoV-2 dans le groupe nominal prend en compte les divergences interlinguistiques et que chaque langue construit son discours, tout en respectant les paramètres morphosyntaxiques de l’intégration des déterminants nominaux.

3 . En guise de conclusion

 

 À la fin de l’analyse du corpus parallèle français-roumain portant sur la pandémie de la COVID-19, il est évident que la terminologie utilisée dans les deux langues comporte des termes monosémiques faisant partie de la nomenclature du domaine : pandémie, épidémie, épidémiologique, COVID-19, SARS-CoV-2. Pourtant, il y a aussi des termes polysémiques comme, par exemple, propagation, flambée, (auto)confinement.

L’approche linguistique des problèmes de traduction a mis en évidence que la langue roumaine utilise la transposition et la modulation (grammaticale et métonymique) comme procédés de traduction visant à respecter le moule syntaxique qui ne permet pas, par exemple, l’expression de relations de possession dans le groupe nominal, vu que la possession s’exprime par les formes flexionnelles impliquant la présence enclitique de l’article défini. On constate donc l’absence de l’article défini auprès des acronymes COVID-19 et SARS-CoV-2, ce qui les met sur le même plan syntaxique que les noms déterminés : fr. « tests de dépistage de la COVID-19 » / roum. « teste pentru depistarea COVID-19 » (trad. litt. « tests pour le dépistage COVID-19 ») et fr. « le diagnostic de la COVID-19 » / roum. « depistarea COVID-19 » (trad. litt. « le dépistage COVID-19 »), « la propagation du SARS-CoV-2 » / roum. « răspândirea SARS-CoV-2 » (trad. litt. « la propagation SARS-CoV-2 »), fr. « la présence de l’acide ribonucléique (ARN) du SARS-CoV-2 » / roum. « prezența acidului ribonucleic (ARN) SARS-CoV-2 » (trad. litt. « la présence de l’acide ribonucléique (ARN) SARS-CoV-2 »).

En revanche, les structures prépositionnelles sont un phénomène récurrent dans la langue roumaine qui préfère expliciter la relation syntaxique établie entre le nom centre (test, vaccin, certificat) et les deux acronymes (« un test pentru depistarea COVID-19 » (trad. litt. « un test pour la détection de la COVID-19 »), « testelor pentru COVID-19 » (trad. litt. « un test pour COVID-19 », « vaccinuri împotriva COVID-19 » (trad. litt. « vaccins contre la COVID-19 »), « certificate de vaccinare împotriva COVID-19 » (trad. litt. « certificats de vaccination contre COVID-19 », « certificatelor interoperabile de vaccinare, testare și vindecare de COVID-19 (certificatul digital al UE privind COVID) » (trad. litt. « certificats interopérables de vaccination, de test et de rétablissement de COVID-19, certificat numérique de l’UE concernant COVID »), tandis que la langue française manifeste une tendance vers le figement de ces constructions, surtout dans le cas des noms certificat et test (« test COVID-19 », « certificats COVID-19 », « certificat COVID », « certificats de vaccination COVID-19 »).

Références bibliographiques

 

CHUQUET, Hélène, PAILLARD, Michel, Approche linguistique des problèmes de traduction anglais-français, Paris, Ophrys, 1989.

COLOMBE, Rachel, SALCEDO ROBLEDO, Manuela, « Confinement », Dictionnaire du genre en traduction / Dictionary of Gender in Translation / Diccionario del género en traducción. https://worldgender.cnrs.fr/notices/confinement/ (mis en ligne le 9.04.2021).

CORNU, Gérard, Linguistique juridique, Paris, Montchrestien, 1990.

DELUZARCHE, Céline, « Épidémie et pandémie : quelle différence ? ». https://www.futura-sciences.com/sante/questions-reponses/epidemie-epidemie-pandemie-difference-13437/ (publié le 11.04.2020).

FERRERI, Silvia, « Le pouvoir de traduire et le droit. Sources européennes et interprétation des textes plurilingues », Synergies Italie, n. 12, 2016, p. 93-108.

Gramatica limbii române (GALR), vol. I, Cuvântul, București, Editura Academiei Române, 2008.

HARVEY, Malcolm, « Traduire l’intraduisible », ILCEA, n. 3, 2002. http://journals.openedition.org/ilcea /790 (mis en ligne le 8.06.2010).

LOOCK, Rudy, La traductologie de corpus, Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2016.

THIÉRY-RIBOULOT, Véronica, « Une étude de sémantique historique du mot confinement », Mots. Les langages du politique, n. 124, 3, 2020, pp. 127-144.

 Corpus

R 2021/953 = Règlement (UE) 2021/953 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2021 relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation de certificats COVID-19 interopérables de vaccination, de test et de rétablissement (certificat COVID numérique de l’UE) afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de COVID-19.

R 2020/1042 = Règlement (UE) 2020/1042 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2020 fixant des mesures temporaires concernant les délais applicables aux phases de collecte, de vérification et d’examen prévues dans le règlement (UE) 2019/788 relatif à l’initiative citoyenne européenne en raison de la propagation de la COVID-1.


[1] Je remercie mes deux relecteurs anonymes pour leurs remarques judicieueses.

[2] Pour garantir l’accès aux actes européens de façon transparente, le premier Règlement (n° 1 du 15 avril 1958) approuvé par le Conseil de la Communauté Économique Européenne établit (art. 3, p. 94) que « Les textes adressés par les institutions à un État membre ou à une personne relevant de la juridiction d’un État membre sont rédigés dans la langue de cet État ».

[3] https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/medecine-pandemie-3838/.

[4] L’Académie française tranche cet aspect par la prise en considération de tous les arguments qui la conduisent vers l’assignation du genre féminin à la COVID-19 : « Covid est l’acronyme de corona virus disease, et les sigles et acronymes ont le genre du nom qui constitue le noyau du syntagme dont ils sont une abréviation. […] Corona virus disease – notons que l’on aurait pu préférer au nom anglais disease le nom latin morbus, de même sens et plus universel – signifie « maladie provoquée par le corona virus (“virus en forme de couronne”) ». On devrait donc dire la Covid 19, puisque le noyau est un équivalent du nom français féminin maladie. Pourquoi alors l’emploi si fréquent du masculin le Covid 19 ? Parce que, avant que cet acronyme ne se répande, on a surtout parlé du corona virus, groupe qui doit son genre, en raison des principes exposés plus haut, au nom masculin virus. Ensuite, par métonymie, on a donné à la maladie le genre de l’agent pathogène qui la provoque. Il n’en reste pas moins que l’emploi du féminin serait préférable et qu’il n’est peut-être pas trop tard pour redonner à cet acronyme le genre qui devrait être le sien (https://www.academie-francaise.fr/le-covid-19-ou-la-covid-19).

[5] La Grammaire de la langue roumaine (2008 : 615) mentionne des « restrictions d’emploi de l’article » imposées par les prépositions utilisées devant les noms. Parmi ces exceptions, on pourrait énumérer la présence d’un article indéfini ou d’autres constituants du groupe nominal.

[6] Sars-Cov-2 est l’acronyme de « Severe Acute Respiratory Syndrome-CoronaVirus-2 » – en français Sars-Cov-2 : le « coronavirus-2 du syndrome respiratoire aigu sévère ». Le chiffre 2 indique qu’il s’agit d’une souche nouvelle du coronavirus, et non pas de celle qui est à l’origine de l’épidémie de Sars de 2002-2004. Ce sont surtout les épidémiologistes qui emploient cette appellation, qui désigne le nom officiel du virus » (https://www.lalibre.be/planete/sante/2021/03/15/pourquoi-le-nom-coronavirus-dou-viennent-les-termes-covid-19-et-sars-cov-2-RI6MQ2VZ7RA23ILC7LRTJBS4WU/).


 

Per citare questo articolo:

Daniela DINCĂ, « Le lexique roumain de la pandémie de COVID-19 dans la communication institutionnelle », Repères DoRiF, n. 25 – Le lexique de la pandémie et ses variantes, DoRiF Università, Roma luglio 2022, https://www.dorif.it/reperes/daniela-dinca-le-lexique-roumain-de-la-pandemie-de-covid-19-dans-la-communication-institutionnelle/

ISSN 2281-3020

Quest’opera è distribuita con Licenza Creative Commons Attribuzione – Non commerciale – Non opere derivate 3.0 Italia.