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Vincenzo LAMBERTINI

 

Acquisition du français parlé par le biais de l’interprétation de dialogue

 

Vincenzo Lambertini
Université de Turin
vincenzo.lambertini@unito.it


Résumé
Cet article vise à analyser la relation qui se noue entre l’acquisition du français parlé et l’interprétation de dialogue (ID). Est-il possible de considérer l’ID non seulement comme une fin en soi mais aussi comme un outil pédagogique ?
Après une introduction théorique et méthodologique sur l’ID et un tour d’horizon sur l’apprentissage du français langue étrangère (FLE) en Italie, nous nous pencherons sur les modalités didactiques principalement employées en ID.
Ensuite, grâce à l’analyse de données issues de deux cours d’ID entre le français et l’italien dispensés en 2019 et en 2022 en présence, nous explorerons les retombées de l’ID sur l’acquisition du français parlé.

Abstract
This paper will focus on the relationship between the acquisition of spoken French and Dialogue Interpreting (DI). The core question of this paper is whether DI can be considered not only as an end in itself but also as a pedagogical tool.
After a theoretical and methodological introduction on DI and an overview on learning French as a Foreign Language in Italy, the main teaching methods used in DI will be explored.
The analysis of data from two face-to-face DI courses between French and Italian provided in 2019 and in 2022 will thus shed light on the impact of DI on spoken French acquisition.

 


 

Introduction[1]

Le rapport entre l’enseignement de la traduction et la traduction dans l’enseignement des langues étrangères a été exploré, au cours des dernières décennies, dans une série d’études théoriques et empiriques[2]. Elles ont mis en évidence non seulement les bienfaits de la traduction (notamment de la version) dans l’enseignement des langues vivantes et des langues mortes, mais aussi les critiques envers un apprentissage des langues étrangères au travers de la traduction. En particulier, on est passé d’un usage habituel de la traduction au sein de la pédagogie des langues étrangères[3], à un déni de la traduction, considérée comme une « source de confusion et d’interférence » (CHADELAT 1999 : 29), pour ensuite revenir à un concept de « traduction comme exercice pédagogique » (LADMIRAL 1971 : 41) et comme outil d’apprentissage linguistique[4].

Dans le domaine de l’interprétation (de conférence et de dialogue), la situation est différente. Dans le panorama didactique italien, la traduction (et notamment la traduction pédagogique) est un dispositif employé dans bien des cursus de langues étrangères, alors que l’interprétation n’est présente que dans les facultés d’interprétation ou de médiation interlinguistique et interculturelle. Pourquoi cette inégalité quant à leur utilisation ?

La première raison est que l’interprétation est généralement peu connue et peu pratiquée par les enseignants de langues étrangères (à moins qu’ils n’aient reçu une formation spécifique en la matière) par rapport à la traduction, qui est, elle, plus répandue et utilisée. En outre, si les traductions sont plus facilement accessibles (ce qui en favorise l’analyse), il est en revanche plus difficile de repérer et de rendre publiques des interactions orales médiées par un interprète, en vertu de leur caractère souvent privé et sensible.

La seconde raison est à mettre en relation avec les termes du décret ministériel italien du 4 octobre 2000, qui indique que les enseignements linguistiques doivent tendre à une analyse métalinguistique de la langue étrangère. Certes, en Italie les cours de langue française s’inscrivent dans le « settore scientifico-disciplinare » (« secteur scientifique-disciplinaire ») dénommé « Lingua e traduzione – lingua francese », où la langue française et la traduction sont censées avoir la même importance. Au niveau institutionnel, on a donc admis la valeur métalinguistique de la traduction, ce qui explique son adoption dans des facultés qui ne sont pas centrées sur la formation des traducteurs. L’absence de l’interprétation pourrait en revanche suggérer que cette dernière n’est pas considérée comme un outil de réflexion métalinguistique.

Néanmoins, nous avançons l’hypothèse que l’interprétation, et notamment l’interprétation de dialogue (dorénavant ID), pourrait s’avérer être un outil très efficace dans l’enseignement et l’acquisition du français parlé. Malheureusement, force est de constater que les études théoriques et empiriques sur ce sujet[5] sont rares, ce qui est peut-être dû au fait que par le passé la formation des interprètes était réservée aux apprenants ayant déjà une très bonne maîtrise de leurs langues d’étude.

Aujourd’hui, les choses ont beaucoup évolué[6]. À la suite de l’intensification des échanges commerciaux et des vagues migratoires à l’échelle mondiale, et, plus en général, en raison du phénomène de mondialisation, la formation en interprétation est plus répandue qu’il y a quelques décennies : ces nouvelles exigences ont ainsi favorisé la naissance de nombreux cursus entièrement consacrés à l’ID. En Italie, ces cursus ne prévoient pas forcément un test d’admission (à la différence des facultés de traduction et interprétation) et sont donc ouverts à un public d’apprenants vaste et hétérogène.

En outre, cette augmentation de la demande d’interprètes ne correspond pas à une croissance diversifiée de l’offre des langues étrangères dans l’enseignement secondaire supérieur : en Italie, seule la filière des lycées linguistiques prévoit l’apprentissage de trois langues étrangères. Certes, une deuxième langue étrangère est enseignée dans les lycées de sciences humaines, dans quelques lycées professionnels, ainsi que dans certains lycées techniques[7]. Toutefois, dans la plupart des lycées, on n’apprend que l’anglais, qui est la langue la plus étudiée en Italie (ce qui reflète d’ailleurs une tendance européenne[8]). Le français est, en revanche, de moins en moins étudié, alors que les échanges (économiques et sociaux) entre l’Italie et les pays francophones demeurent très importants. C’est peut-être pour cette raison qu’en Italie, dans les facultés de traduction et d’interprétation, le nombre d’étudiants débutants choisissant le français comme deuxième langue étrangère[9] augmente de plus en plus. Voilà pourquoi l’enseignement de l’ID s’adressant à des étudiants qui en sont encore à un stade très précoce de l’apprentissage linguistique est d’ores et déjà une réalité.

Il s’agit donc d’une pratique qui existe et qui est admise. On peut alors renverser la façon de l’envisager et s’interroger sur la possibilité de considérer l’ID non seulement comme une fin en soi, mais aussi comme un outil d’acquisition de la langue parlée, y compris pour des apprenants débutants. La présente étude se propose de répondre à cette question, en précisant au préalable ce que nous entendons par français parlé (§ 1), ce qu’est l’ID (§ 2), quelles sont les compétences nécessaires en ID (§ 2.1) et quels sont les exercices les plus pratiqués en ID (§ 3). Ensuite, nous allons nous concentrer sur deux cours d’Introduction à l’interprétation de dialogue entre l’italien et le français, dispensés en présence en 2019 et en 2022 à l’Université de Bologne (Italie) (§ 4). Nous chercherons ainsi à comprendre quelle est l’attitude des apprenants vis-à-vis du français parlé au début de leur (par)cours (via des questionnaires) et quelles sont les stratégies qu’ils peuvent adopter à la fin de leur cours pour surmonter les obstacles que pose normalement l’interaction orale (à travers l’analyse qualitative de leurs examens).

1. Quel français parlé ?

Le français parlé peut être abordé et défini suivant différents points de vue : nous mentionnons, entre autres, les aspects liés à la prononciation, mais aussi le niveau pragmatique, communicatif, sociolinguistique, voire l’optique interactionnelle. Dans cet article, nous prendrons en compte cette dernière dimension, à savoir le français parlé en interaction, qui présente, comme le rappelle TRAVERSO (2016 : 17-38), certaines caractéristiques saillantes. Avant tout, il s’agit d’une élaboration online, à savoir une parole qui se (co-)construit tout au long de l’interaction grâce à la collaboration des participants et que l’on peut comprendre seulement si l’on abandonne une conception normative de la langue en faveur d’une conception temporelle de la parole elle-même. La parole en interaction est donc une succession d’évènements (verbaux, paraverbaux et non verbaux) ayant du sens s’ils sont considérés l’un après l’autre et en fonction du contexte.

Force est de constater que pour comprendre et apprendre le français parlé en interaction deux caractéristiques s’imposent : d’une part, il faut développer la capacité d’analyse de l’interaction orale, en prenant en considération les actions (tous azimuts) accomplies par les participants, en suivant une démarche ascendante (ou bottom-up) et en abandonnant une conception purement normative de la langue ; d’autre part, il est nécessaire de développer des stratégies pour participer à la co-construction de la parole, en mettant en valeur son identité.

2. L’interprétation de dialogue (ID)

Il convient de définir l’ID, tout en sachant qu’il s’agit d’une pratique complexe qui ne peut certes pas être résumée en quelques mots. Commençons par l’étiquette sélectionnée pour définir cette activité, à savoir interprétation de dialogue, qui a été préférée au terme médiation, employé par exemple dans le Cadre Européen Commun de Référence pour les langues (CECR) du Conseil de l’Europe (2001). Ce choix répond tout d’abord à une volonté de précision (le mot médiation est assez général et inclut tant l’interprétation que la traduction). En second lieu les aspects théoriques sont pris en compte dans cette étiquette, car elle insiste sur l’approche interactionnelle à cette discipline et au français parlé.

L’ID est en effet un type d’interaction triadique qui se déroule à l’oral, en face à face (ou bien par téléphone ou en visioconférence), où l’un des participants est un interprète facilitant la communication entre les autres participants appartenant à des communautés linguistiques et culturelles différentes et qui traduit des langues et vers les langues des participants (CHESSA, 2012 : 15). La dénomination choisie met en lumière non seulement la partie interactive de l’événement, mais aussi le rôle de l’interprète : comme le souligne WADENSJÖ (1998 : 105-106), l’interprète ne fait pas seulement fonction de traducteur mais il joue un rôle actif[10] dans la communication, en gérant et en coordonnant également la situation elle-même. Ce constat représente une véritable révolution dans la conception du rôle de l’interprète, qui devient visible après avoir été considéré comme invisible. Grâce à sa visibilité reconnue, l’interprète peut et doit s’impliquer dans l’interaction avec sa double identité de participant et d’interprète.

2.1. Les compétences nécessaires en ID

Il convient maintenant d’esquisser les principales compétences nécessaires en ID. Les premières compétences sont liées à la dimension orale des langues utilisées lors des interactions médiées par l’interprète, ce qui représente également l’un des premiers obstacles auxquels se heurtent les apprenants au début de leur parcours de formation en ID. En particulier, les apprenants doivent développer des compétences telles que l’écoute et l’analyse des tours de parole produits par les participants aux interactions, la mémoire et la reformulation, mais aussi la bidirectionnalité et l’interculturalité (SANDRELLI 2005 : 84-86). C’est en particulier la bidirectionnalité qui caractérise l’ID : il s’agit de la capacité de traduire et de passer d’une langue à l’autre tout en suivant le rythme de l’interaction triadique. À ces compétences, RUDVIN, TOMMASSINI (2011 : 85-88) ajoutent des compétences interactionnelles, qui font référence, entre autres, au rôle de coordination de l’interprète, à la gestion de la communication, à la reconnaissance de la juste valeur des énoncés et des éléments paraverbaux et non verbaux. Il faut également insister, à notre sens, sur un autre aspect lié à la compétence interactionnelle : la capacité de l’interprète d’entamer des séquences dyadiques, à savoir des conversations additionnelles pour gérer l’interaction ou pour résoudre des problèmes spécifiques (cf. 4.3.1). L’interprète doit ainsi avoir non seulement une bonne connaissance de ses langues de travail, mais aussi de bonnes capacités de gestion et de création de conversations. Bref, il doit aussi être un professionnel de la conversation et de l’interaction.

3. La didactique de l’ID

En Italie, la didactique de l’ID repose largement sur des méthodologies d’enseignement pratiques, grâce auxquelles on apprend en pratiquant (learning by doing)[11]. Toutefois, les dernières tendances dans ce domaine mettent l’accent sur l’importance d’apprendre en observant des interactions authentiques, en échangeant (non seulement avec l’enseignant mais aussi avec les autres apprenants) et en analysant des données authentiques (NIEMANTS, CIRILLO 2017 : 15). La didactique de l’ID vise donc à développer le savoir-faire des apprenants, en favorisant leur savoir-observer autonome, pour apprendre à se servir de la bonne stratégie, au bon moment.

Les exercices qui sont habituellement proposés dans un cours d’introduction à l’ID peuvent être nombreux et variés : ils peuvent aller, à titre d’exemple, de la traduction à vue, à la reformulation (intra- et inter linguistique), en passant par la mémorisation sans prise de notes. Toutefois, l’outil didactique par excellence de l’ID (ainsi que l’une des épreuves les plus utilisées pour évaluer les apprenants) est le jeu de rôle, où l’on simule des situations où deux participants ne parlant pas la même langue ont besoin de la médiation d’un interprète pour communiquer. Il s’agit généralement de deux enseignants, chacun natif d’une des deux langues faisant l’objet du cours, qui font semblant de ne pas se comprendre ; l’interprète doit donc faciliter leur compréhension mutuelle. Normalement, les enseignants lisent un texte dialogique (plus ou moins détaillé), mais il leur arrive d’improviser lorsque l’interprète s’éloigne de manière plus ou moins consciente du contenu du dialogue de départ. Cette activité permet de proposer à la fois un exercice pratique pour les apprenants qui font fonction d’interprètes et un exercice d’analyse pour les apprenants qui observent le déroulement du jeu de rôle. C’est grâce aux jeux de rôles que les apprenants se rendent compte de l’importance du contexte, du fonctionnement de la langue parlée dans des situations réelles et de la valeur interactionnelle de la parole : les locuteurs ne s’expriment pas seulement pour passer des informations, mais aussi, voire surtout, pour créer des relations (BROWN, YULE 1983 : 1-24). Il revient donc à l’interprète de favoriser aussi bien la cohésion de la situation de communication que le renforcement ou la construction des relations entre les participants.

4. L’ID en didactique du FLE et du français parlé

4.1. Un cours d’ID entre le français et l’italien : focus sur les apprenants

Afin de mettre en évidence un éventuel apport positif de l’ID pour l’apprentissage du français parlé, nous avons décidé d’analyser deux cours d’Introduction à l’interprétation de dialogue entre le français et l’italien adressés à un groupe d’apprenants au début de leurs parcours de formation, en basant nos réflexions sur des questionnaires et sur des enregistrements de leurs examens. Les premiers permettent de mieux connaître le groupe d’apprenants eux-mêmes et leur rapport à l’apprentissage linguistique et au français parlé ; les seconds donnent la possibilité de vérifier si les stratégies de l’ID peuvent favoriser l’acquisition du français parlé en interaction.

Ces cours ont été dispensés en présentiel de février à mai 2019 et de février à mai 2022[12], pendant dix semaines et pour une durée totale de 40 heures chacun. Ils s’adressaient à un public respectivement de 24 et de 26 apprenants (pour un total de 50 étudiants) de première année de Licence en Médiation linguistique interculturelle (qui correspondrait plus ou moins à une licence en Langues Étrangères Appliquées), au Département d’Interprétation et Traduction (DIT), Université de Bologne (Campus de Forlì, Italie) qui n’avaient passé aucun test de français, ce qui justifie des écarts non négligeables quant à leurs compétences en langue française.

En effet, ces deux groupes d’apprenants étaient très hétérogènes quant à leur niveau de français. Dans chaque groupe, environ 50% des étudiants étaient débutants (ils avaient commencé à étudier le français quatre mois avant le début du cours) ou faux débutants (ils avaient déjà eu de premiers contacts avec la langue française, notamment au collège) ; presque 35 à 40% avaient déjà acquis un niveau B2 ; 10 à 15% n’étaient pas italophones (nous soulignons qu’un étudiant en 2019 et deux étudiants en 2022 étaient de langue maternelle française).

En raison de l’hétérogénéité des apprenants, et afin d’adapter la didactique de l’ID à leurs exigences, nous leur avons soumis un questionnaire à réponse ouverte au tout premier cours. Notre objectif était de saisir leur perception concernant leur niveau de français, voire leurs attentes et leurs besoins de formation. Sans entrer ici dans le détail des réponses, il convient tout de même de mettre en évidence quelques considérations générales. Nous avons constaté sans surprise des différences remarquables entre, d’une part, les apprenants débutants et faux débutants et, d’autre part, les apprenants avancés quant à leurs besoins de formation : les premiers disaient vouloir approfondir des aspects liés à la grammaire, alors que les seconds évoquaient généralement la nécessité d’aborder le français oral utilisé dans des registres familiers et dans des situations de la vie de tous les jours. A ce titre, la réponse d’une apprenante avancée (que nous citons verbatim) nous paraît emblématique : « Mes lacunes en français concernent les mots les plus familiers et informels (étant donné que j’ai appris le français des livres de texte[13]) ». Il s’agit d’une critique plutôt nette de la manière (assez normative) dont le français est appréhendé dans l’enseignement secondaire en Italie. Mais le fait que ce soient surtout les apprenants avancés qui affirment vouloir se focaliser sur la langue parlée et sur le registre familier révèle que cette exigence est ressentie lorsque les apprenants croient avoir de bonnes connaissances linguistiques et grammaticales (qui ne doivent pas être négligées, même dans un cours voué entièrement à l’oralité).

Si les besoins des apprenants relèvent de leur niveau de langue, la manière dont ils conçoivent l’apprentissage du FLE est en revanche assez homogène. Voici trois réponses qui sont à notre avis emblématiques. La première est formulée par un étudiant avancé qui se plaint de ne pas être parfait (« Je ne suis pas parfait »… comme si la perfection existait et qu’on pouvait l’apprendre !) ; la deuxième réponse est d’une étudiante débutante qui part du principe que comme elle est débutante elle ne peut pas parler en français (« Je suis une débutante et je ne parle pas *française », comme si le fait d’avoir un niveau débutant empêchait de communiquer oralement en langue étrangère) ; la troisième réponse est rédigée par une étudiante avancée qui estime que la capacité de communiquer est directement proportionnelle au nombre de mots connus (« J’ai du mal dans la communication parce que mon lexique n’est pas suffisant »). Force est de constater, en outre, qu’aucun des apprenants interviewés ne prend en compte la dimension interactionnelle et communicative de la langue orale, ce qui témoigne d’une approche à l’apprentissage du FLE lexicale et grammaticale plutôt que communicative. Par contre, une approche communicative pourrait être d’un grand secours pour tous les apprenants, car elle développerait non seulement des compétences grammaticales, mais aussi des compétences sociolinguistiques et stratégiques[14].

Enfin, au niveau des attentes de formation, nous signalons que certains apprenants, tous niveaux confondus, ont mentionné l’oralité comme l’une des capacités qu’ils souhaitaient acquérir. La langue parlée peut ainsi être considérée comme un domaine qui intéresse tous les apprenants, quel que soit leur niveau initial, et à partir duquel ils ont tous quelque chose à apprendre. En quelque sorte, l’apprentissage du français parlé en interaction pourrait contribuer à rééquilibrer des classes aussi hétérogènes que celles faisant l’objet de cette étude.

4.2. Principaux exercices proposés

Comme nous l’avons mentionné plus haut, le « noyau dur des unités didactiques » en ID sont les jeux de rôles (BALLARDINI 2006 : 49). Toutefois, ces activités n’ont pas été proposées dès le début du cours, mais à partir de la cinquième semaine, pour accompagner progressivement les étudiants dans le passage de la langue écrite à la langue orale, ce qui est une démarche conseillée par bien des études (voir entre autres MERLINI 2007 ; CHESSA 2012 : 63 ; SANDRELLI 2005 : 84-84).

Au cours des quatre premières semaines, nous avons ainsi travaillé sur de brefs discours monologiques en italien, à savoir des messages vocaux envoyés à travers la plateforme WhatsApp et choisis par les apprenants eux-mêmes. Cet exercice permettait d’analyser le fonctionnement de l’italien parlé[15] pour mieux comprendre les caractéristiques de l’oralité, telles que, entre autres, les disfluences, les phrases inachevées, les hésitations, les répétitions et les faux départs. Il a ainsi été possible de souligner la difficulté de comprendre la langue orale même quand il s’agit d’une langue maternelle et, en même temps, l’importance du repérage (dans le contexte et dans le cotexte) d’indices permettant de bien déchiffrer le message.

Successivement, nous avons proposé des reformulations intralinguistiques en langue italienne : il s’agissait, en l’occurrence, de reformulations orales de textes écrits. La condition posée était de ne pas utiliser les mots présents dans les textes de départ, ce qui a permis de passer de l’écrit à l’oral et de prendre conscience que les difficultés de cet exercice ne dépendent pas seulement de la langue étrangère. Par la suite, la dimension inter linguistique a été abordée avec des traductions à première vue.

Après cette phase préparatoire, on a introduit des jeux de rôles (suivant les principes mentionnés en § 3) portant généralement sur le domaine du tourisme, de l’hôtellerie et de la restauration, tout en évitant des interactions bien plus complexes en milieu médical, social ou judiciaire. Ce choix s’est imposé pour deux raisons : d’une part, la préparation linguistique des apprenants n’était pas suffisante pour leur permettre de participer en tant qu’interprètes à des interactions aussi complexes ; d’autre part, nous avons évité des interactions asymétriques pour baisser le filtre affectif[16] et favoriser en même temps l’acquisition du français parlé dans des situations de la vie quotidienne.

4.3. Analyse des examens du cours d’Introduction à l’ID entre le français et l’italien

Le jeu de rôle n’a pas seulement été l’une des méthodologies didactiques utilisées dans ce cours, mais il a aussi servi comme outil d’évaluation : l’examen que devaient passer les apprenants consistait en un jeu de rôle permettant de vérifier l’acquisition des principales compétences en ID et en particulier la capacité de gestion des interactions. L’enregistrement et la transcription des épreuves permettent d’analyser les performances des étudiants, afin de répondre à différentes questions concernant leur degré d’acquisition du français parlé.

Avant de présenter les points saillants de l’analyse des examens, il convient de préciser comment ils ont été organisés. Les étudiants ont été répartis en plusieurs groupes et à chaque groupe était attribué un jeu de rôle : de cette manière, le même dialogue était proposé aux membres d’un même groupe, en faisant en sorte que chaque étudiant n’entende pas le texte avant de passer son examen, afin que le jeu de rôle soit vraiment inédit pour chacun. Grâce à cette démarche, il était plus simple de détecter les difficultés que posait chaque texte aux apprenants, même s’il était impossible de créer deux fois la même interaction. En effet, les deux professeurs (l’un italophone et l’autre francophone), jouant les rôles des participants italophones et francophones, adaptaient la lecture du script aux tours de parole des étudiants. En outre, étant donné que le macro-sujet du cours était le tourisme, les étudiants savaient que les différents dialogues porteraient sur ce domaine, sans pour autant recevoir au préalable d’indications ni sur le sujet précis de chaque dialogue ni sur le vocabulaire nécessaire.

L’analyse qualitative des examens met en lumière que les apprenants ont acquis certaines stratégies pour surmonter les obstacles que posent la langue parlée et l’ID, ainsi que pour communiquer de manière efficace en dépit de leurs lacunes linguistiques. Ces stratégies sont notamment liées à la capacité des apprenants de jouer un rôle actif dans les interactions.

Nous allons maintenant nous concentrer sur quelques-unes de ces stratégies, en analysant quelques extraits d’examens qui ont été transcrits selon les conventions de transcription habituellement utilisées en analyse conversationnelle[17] et expliquées dans le tableau suivant :

Tableau 1 : Conventions de transcription

 

4.3.1. La demande de précision

L’exercice de l’ID habitue les apprenants à participer activement à l’interaction en langue maternelle et en langue étrangère. Ce n’est pas un hasard si les apprenants, quand ils butent sur un obstacle, cherchent immédiatement à résoudre le problème en ayant recours à l’interaction avec les autres participants, au lieu de se bloquer ou de déclarer leurs difficultés. La demande d’éclaircissement est alors l’un des principaux outils que les apprenants (tant les débutants que les avancés) ont effectivement utilisé dans leurs examens. Focalisons-nous sur les exemples (1) et (2) tirés d’un jeu de rôle où un client italien (IT) demande des informations sur un séjour linguistique en France à une agente de voyage française (FR). Ce jeu de rôle a été proposé à sept apprenants différents qui ne pouvaient pas s’entendre et pour qui le texte était inconnu. L’interprète (INT) de l’extrait (1) était une apprenante de langue maternelle anglaise et débutante de français, alors que l’interprète (INT) de l’extrait (2) était un apprenant de langue maternelle roumaine et avancé de français. (1) et (2) suivent immédiatement ce tour de parole produit par FR :

Plusieurs solutions sont possibles : vous pouvez loger chez l’habitant, ou bien dans des appartements partagés, ou encore dans des hôtels. Le séjour chez l’habitant est sans aucun doute le meilleur moyen d’être totalement immergé dans la culture française.

 

 

Nous avons constaté que le concept de « séjour chez l’habitant » a constitué un problème pour les sept apprenants qui ont affronté le même dialogue, probablement parce qu’il n’existe pas une expression équivalente en italien et qu’on ne peut pas la traduire mot à mot (« alloggiare a casa dell’abitante », qui serait la traduction littérale, n’est pas une expression consacrée). Les exemples (1) et (2) montrent que les deux INT ont décidé de s’assurer de la bonne compréhension du tour de parole en français, en formulant des demandes de précision bien différentes. Dans l’exemple (1), la requête est un peu maladroite, étant donné qu’elle porte atteinte à la face négative[18] de FR, à cause de l’usage de l’impératif (répétez). Toutefois, INT s’est engagée dans l’interaction avec sa double identité d’interprète et d’apprenante débutante de langue maternelle anglaise (ce qui est mis en évidence par son accent anglophone). Ce fait peut avoir favorisé une meilleure acceptation de sa demande d’explication. On remarque, en effet, une attitude de coopération de FR, qui suggère sans hésiter un seul mot (solutions) avec une intonation interrogative pour être sûre de reformuler la partie qui sert à INT. Cette dernière répète le même mot, avec une intonation descendante, pour confirmer la demande de précision de la part de FR. Il s’agit d’une séquence de réparation (voir SCHEGLOFF et al. 1977 ; TRAVERSO 2016 : 101-102) très élémentaire d’un point de vue linguistique mais très efficace d’un point de vue communicatif et conversationnel. Force est de constater, d’ailleurs, que INT atteint son but malgré ses instruments linguistiques limités : la concision de sa demande d’éclaircissement favorise sans nul doute une reformulation rapide et ciblée de la participante francophone.

Dans l’exemple (2), la demande de précision est formulée de manière à ne pas menacer la face négative de FR : INT reformule lui-même le concept du « séjour chez l’habitant » en se servant d’un terme anglais (donc une[19] type de couchsurfing) pour en négocier la signification. FR a donc la possibilité de préciser ce qu’elle entend par « séjour chez l’habitant », en produisant un tour de parole plus élaboré que celui de l’exemple (1). On observe que les deux participants (INT et FR) s’engagent dans une séquence dyadique[20], se déroulant de la ligne 2 à la ligne 10 et vouée à définir de manière collaborative le concept au cœur de cet échange. En effet, d’une part, INT participe activement à l’explication (ce qui est souligné par les signaux de confirmation qu’il produit, en répétant ok et oui), d’autre part FR montre sa proximité vis-à-vis de INT, en réitérant un marqueur d’acceptation (ouais) au début et à la fin de cet échange (à la ligne 2 et à la ligne 10), ayant toutefois deux sens distincts : à la ligne 2, ouais introduit un accord partiel suivi d’une précision ; à la ligne 10, FR souligne le succès de ce dialogue par un ouais final. Ce qu’il faut retenir pour notre étude, c’est que même si les outils linguistiques de l’apprenant étaient assez rudimentaires, il s’est servi d’instruments conversationnels et interactionnels pour entamer une séquence dyadique et résoudre ses difficultés.

4.3.2. La construction de relations « positives » entre les participants

La difficulté de l’ID semble mener les étudiants à simplifier leurs traductions, notamment lorsqu’ils traduisent vers leur langue étrangère. Ces simplifications ne sont pas faites au hasard, mais elles suivent des schémas qui reflètent les considérations formulées lors des jeux de rôle effectués et analysés en classe. L’exemple suivant est tiré d’un autre dialogue, où un client italophone (IT) s’adresse à une agente de voyage francophone (FR) afin d’organiser une croisière pour sa femme et lui-même. Afin de connaître les intérêts du couple italien, FR mentionne quelques activités parmi lesquelles IT peut sélectionner les plus adéquates : des spectacles, des cours de danse, des cours de gym, des jeux de société, etc. IT souligne d’abord que sa femme et lui ne sont intéressés ni par les spectacles ni par les cours de danse ; ensuite, il exprime leur enthousiasme pour les jeux de société. Dans l’extrait suivant (3), l’interprète (INT) est un apprenant faux débutant et de langue maternelle italienne.

 

On remarque que l’apprenant doit encore consolider ses outils linguistiques : il emploie un futur simple (aimerons) au lieu d’un conditionnel présent (aimerions) et il ne fait pas suivre au verbe jouer la préposition à lorsqu’il fait référence au jeu auquel l’on joue. Toutefois, il parvient à transmettre efficacement le message du locuteur italien, en éliminant la partie niée (en fait la danse et les spectacles ne nous intéressent pas beaucoup, qui n’est pas strictement nécessaire à la construction de la conversation) et en se focalisant sur le sujet clé (les jeux de société) au cœur de l’accord entre les parties. De cette manière, il simplifie l’énoncé qu’il produit en français, tout en étant plus efficace par rapport au tour original : l’effacement de la négation contribue à la fonction interactionnelle de la parole, qui est ici privilégiée par rapport à la fonction transactionnelle de la langue[22], tout en consolidant les relations entre les deux autres participants.

4.3.3. Effort de reformulation et simplification

Nos données montrent que l’ID aide les apprenants à viser la simplicité, notamment lorsqu’ils traduisent vers le français. Les deux exemples suivants sont tirés du même dialogue concernant l’organisation d’un voyage. Dans cet extrait, un client italien souhaite recevoir une offre économique, en affirmant : « Ho un budget piuttosto ristretto » (trad. : J’ai un budget plutôt serré). Les deux apprenants qui ont produit les tours de parole (4) et (5) sont respectivement une apprenante avancée et un apprenant débutant.

Nous remarquons que l’apprenant débutant (5) est plus efficace par rapport à l’apprenante avancée (4) : il n’est pas seulement plus correct d’un point de vue lexical et grammatical, mais il est aussi plus concis et plus direct. Par contre, dans le tour de parole de l’apprenante avancée nous remarquons des disfluences et un mot mal prononcé (*badgette au lieu de budget). La capacité de reformuler des concepts en utilisant des mots simples et à sa portée, ainsi que la capacité d’aller au-delà des mots pour saisir le message d’un locuteur, le simplifier et en transmettre l’essentiel est l’une des compétences qui peuvent être favorisées par l’ID et qui peuvent faciliter les apprenants (même les moins avancés) à l’oral.

Conclusion

Cette étude a exploré les apports de l’ID à l’acquisition du français parlé. Tout d’abord, nous avons vérifié que l’ID peut être introduite dans une phase précoce de l’apprentissage linguistique, y compris avec des classes hétérogènes (composées d’apprenants débutants et avancés), grâce aux similitudes entre l’ID et le français parlé en interaction. En effet, aussi bien l’ID que la parole en interaction mettent l’accent sur la gestion et sur la co-construction de l’interaction. En outre, la langue parlée ne représente pas une lacune uniquement pour les apprenants débutants, mais elle l’est aussi pour les avancés, qui ont souvent reçu une formation linguistique liée plutôt à l’écrit qu’à l’oral spontané. Le travail sur la langue parlée pourrait alors être un moyen pour rééquilibrer des classes hétérogènes.

L’ID prévoit l’acquisition de stratégies grâce à la pratique et à l’observation. Ces stratégies, comme nous l’avons vu dans la section consacrée à l’analyse des données (cf. 4.3), reposent notamment sur l’interaction, sur l’identité et sur le rôle actif de l’interprète, voire sur la co-construction du sens avec les autres participants et sur la reformulation et la simplification du message. Ces stratégies permettent en outre à l’apprenant de ne pas subir passivement la langue parlée mais d’en comprendre les caractéristiques et les moyens, afin de les utiliser pour faire face aux obstacles qu’elle pose.

Cet article a donc mis en évidence que l’ID, loin d’être une discipline cloisonnée et une fin en soi, peut être considérée et employée comme une méthodologie didactique favorisant l’acquisition et l’analyse du français parlé en interaction. Reste à savoir s’il est possible de concevoir une interprétation pédagogique dont on peut se servir dans des facultés qui ne visent pas la formation des futurs interprètes.

 

Bibliographie

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[1] Pour des raisons de lisibilité et de concision, nous n’aurons pas recours à l’écriture inclusive. Nous le regrettons. Lorsque nous parlerons, par exemple, d’apprenant ou d’étudiant nous ferons référence au féminin et au masculin. Nous signalons également que la dernière consultation des documents en ligne mentionnés dans cet article remonte au mois de décembre 2022.

[2] Visant également à évaluer les compétences acquises dans ce domaine. Voir, à cet égard, les études réunies par DELISLE, LEE-JAHNKE (1998).

[3] Cf. GARNIER (1998 : 7-23).

[4] Cf. aussi AHMADI (2019) et STEWART (2008).

[5] Il existe quelques études se focalisant sur le binôme interprétation/apprentissage des langues étrangères. Nous rappelons à cet égard : PRIETO ARRANZ (2002) ; ZANNIRATO (2008) ; LA SALA (2009) ; PICCARDO (2012) ; YAN et al. (2018 : 101-121).

[6] Selon ZANNIRATO (2008 : 21), même la didactique de l’interprétation de conférence doit désormais s’adresser à des apprenants qui ne sont plus bilingues, comme c’était le cas il y a quelques décennies.

[7] Document rédigé en 2011 par le MIUR (Ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche italien), et disponible sur Internet (URL : https://www.orientamentoistruzione.it/_file/documenti/QUADRI_ORARI/MIUR-%20Scuola%20Secondaria-superiore.pdf).

[8] D’après un article de la Représentation d’Italie auprès de la Commission européenne du 25 septembre 2017 (URL : https://ec.europa.eu/italy/news/20170925_insegnamento_lingue_straniere_scuola_primaria_it).

[9] Les candidats voulant accéder à une faculté d’interprétation et de traduction ne sont souvent testés que sur leur première langue étrangère.

[10] Wadensjö (1998 : 10-12) parle à cet égard de « communicative pas de trois » (pas de trois communicatif), une métaphore qui rend justice au rôle de l’interprète de dialogue.

[11] Cf., entre autres, NIEMANTS (2018).

[12] Nous avons exclu de cette étude les cours que nous avons dispensés à distance pendant la pandémie de Covid-19, pour limiter les variables externes qui pourraient influencer nos observations.

[13] Calque de l’italien : ici, l’apprenante veut faire référence aux « manuels scolaires ». Elle propose, en outre, une comparaison entre son niveau lexical en français et en italien : si elle dénonce en français ses lacunes lexicales dans des registres plus familiers, la même apprenante affirme qu’en italien elle a des difficultés avec les registres les plus soutenus.

[14] Pour approfondir la notion de « compétence communicative » formée de compétences grammaticales, sociolinguistiques et stratégiques, voir CANALE, SWAIN (1980 : 27-31).

[15] Ce choix a été motivé par le constat que la langue maternelle peut aider à contrôler l’anxiété liée à l’apprentissage de la langue étrangère (cf. DE CARLO 2012 : 305 ; BALLARDINI 2006 : 47-48).

[16] Sur l’hypothèse du filtre affectif, cf. KRASHEN (1982 : 30-32).

[17] Les conventions de transcription ont été tirées et adaptées de TRAVERSO (2007 : 24-26 ; 2016 : 9-10).

[18] Selon la théorie de la politesse linguistique (à laquelle ont donné une contribution non négligeable Brown et Levinson, 1987), les participants à une interaction ont une face positive (l’image de soi reconnue par les autres) et une face négative, à savoir, « l’espace personnel à l’intérieur duquel les individus ont le droit d’agir sans avoir de compte à rendre » (TRAVERSO 2007 : 51).

[19] Nous remarquons ici une erreur d’accord entre l’article et le substantif, qui relève d’une part d’une compétence en langue orale spontanée qui doit encore être peaufinée et, d’autre part, de la situation de difficulté à laquelle est soumis l’apprenant, qui doit gérer en même temps différents efforts cognitifs.

[20] À savoir une séquence qui n’implique que deux participants et qui peut élargir, expliciter ou synthétiser un autre tour de parole (cf., entre autres, GAVIOLI 2018 : 15).

[21] Traduction : « En fait, la danse et les spectacles ne nous intéressent pas beaucoup, mais oui, la question des jeux de société, pourquoi pas, ça m’intrigue beaucoup, nous les aimons bien ».

[22] Sur les fonctions interactionnelle (ou visant à établir ou à maintenir un contact avec son interlocuteur) et transactionnelle (ou vouée à la transmission d’informations), cf. BROWN, YULE (1983 : 1-4).

 


Per citare questo articolo:

Vincenzo LAMBERTINI, « Acquisition du français parlé par le biais de l’interprétation de dialogue », Repères DoRiF, numéro hors-série Oral en didactique du FLE et expérientiel : Questionnements et perspectives, DoRiF Università, Roma, dicembre 2023, https://www.dorif.it/reperes/vincenzo-lambertini-acquisition-du-francais-parle-par-le-biais-de-linterpretation-de-dialogue/

ISSN 2281-3020

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