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Simona MUNARI

 

Pour une approche interculturelle : le texte littéraire translingue dans l’enseignement du FLE

 

 

Simona Munari
Università di Roma Tor Vergata


Résumé

Dans le cadre du renouvellement des approches à la didactique du FLE le retour du texte littéraire comme laboratoire langagier et comme espace à explorer a fait place à une littérature monde en voie de canonisation qui par sa spécificité liée à la variété des contextes semble privilégier un point de vue hybride et métissé valorisant les altérités. Les trajectoires individuelles de certains auteurs translingues font de leur œuvre à caractère autobiographique un document authentique qui résonne avec les expériences et les intérêts des étudiants d’aujourd’hui. Cet article présente un projet de lecture de quelques autobiographies langagières en classe de FLE niveau avancé pour vérifier dans quelle mesure et par quelles stratégies l’exploitation de la complexité des écritures translingues dans l’enseignement supérieur peut encourager l’élaboration d’un regard interculturel.

Abstract

Within the renewal of the approaches to the teaching of French as a foreign language, the return to the literary text as a language laboratory has given way to a world literature currently in the process of being canonised. Through its specificity, linked to the variety of contexts, such a novel approach seems to prioritise a hybrid and multicultural point of view that enhances the value of otherness. The autobiographical works of certain translingual authors, by virtue of their individual personal experiences, become in fact authentic documents that resonate with the interests of today’s students. This article aim to verify how well the study of some translingual texts in FLE advanced level classes can encourage the development of an intercultural perspective.


1. Le potentiel des écritures translingues

Les documents qui exposent les apprenants à la pratique vivante de la langue étrangère ont longtemps été privilégiés en didactique du FLE pour consolider l’acquisition d’une compétence pragmatique. Le fait littéraire n’était pas jugé assez authentique, et en raison de ses composantes esthétiques il ne paraissait accessible qu’une fois « solidement établies les fondations de la langue parlée et de la langue écrite usuelle » (COSTE 1982 : 70). Sur la base de ce principe, la transition de la langue à la culture réclamait un bagage linguistique remarquable, apte à favoriser le passage du sens littéral (compréhension) au sens littéraire (analyse) (WOERLY 2015 : 157).

L’immense réservoir de textes littéraires permettrait, au contraire, de les introduire dès le début selon le genre et l’époque à laquelle ils ont été écrits, le niveau B2 autrefois indiqué dans les CECR pour la production, réception et représentation des œuvres littéraires n’étant d’ailleurs plus qu’un repère purement indicatif où le type de formation, la langue maternelle des apprenants, leur âge et d’autres données entrent en jeu (CHNANE-DAVIN, CUQ 2021 :  61) dans des groupes classes qui sont désormais « un paysage disciplinaire de plus en plus archipélagique » (TRAISNEL, RAZAFIMANDIMBIMANANA, 2022 : 78).

Pour intégrer aux cours de langue la référence à des auteurs qu’il est rare de trouver dans les manuels, ainsi que des modalités de lecture censées produire une réflexion sur les enjeux de l’interculturel, il est donc essentiel de considérer la littérature comme « un type de partage » (TOUBERT 2017 : 1) assurant aux élèves la possibilité de « travailler selon leurs propres itinéraires d’appropriation » (PRZESMYCKI 2004 : 10). À l’heure où  le système scolaire appelle à un enseignement « motivant » (GODARD 2015 : 302) qui engage l’écoute et la médiation, la vision fonctionnelle de la langue fait place à la nécessité de « considérer les apprenants comme des êtres plurilingues et pluriculturels », ce qui revient à « leur permettre d’utiliser, si nécessaire, toutes leurs ressources linguistiques, les encourager à voir les ressemblances et les régularités aussi bien que les différences entre les langues et les cultures ». (CECR 2021 : 30).

Sur la base de ce principe, le projet réalisé avec les étudiants de Langues et littératures étrangères d’une université italienne dans le cadre du cours de Langue et traduction française pour le Master se proposait de concrétiser la perspective interculturelle par l’étude de quelques biographies langagières d’auteurs francophones translingues. Il s’agit d’un contexte d’enseignement supérieur où les groupes classes, souvent caractérisés par la diversité des langues et culture en présence, ne sont pas toujours homogènes au point de vue du niveau de langue, mais l’organisation du travail tenait principalement à l’idée qu’exposer les apprenants à une littérature française plurielle et à des représentations moins stéréotypées de la langue sollicite leur curiosité pour les aspects culturels (CHISS 2021 : 176-177).

Il n’est pas rare que les « auteurs français langue étrangère » provenant d’ailleurs explorent leur patrimoine linguistique et culturel par des « autoscopies linguistiques » (DELBART 2007 : 144-145) aptes à briser les idées reçues. C’est donc principalement par une mise en question de la figure de l’étranger dans le regard de l’autre – mais aussi dans le regard de soi – que les spécialistes tracent de nouvelles pistes de travail axées sur l’explicitation des décalages entraînés par la mobilité. Dans cette perspective, le caractère performatif d’un récit migrant en fait un dispositif linguistique permettant d’envisager une analyse des trajectoires « sous l’angle des mutations et des redéfinitions identitaires qu’elles impliquent » (KELLER-GERBER 2019 : 56) : son introduction en classe de FLE peut donc sensibiliser les apprenants sur la présence de la langue française en dehors de la France, ainsi que sur les enjeux de leur propre parcours linguistico-culturel.

Un contexte d’apprentissage qui valorise un espace de rencontre et d’échange  permet de questionner la littérature migrante en axant les démarches pédagogiques sur la découverte plutôt que sur l’analyse du texte littéraire : la littérature et les œuvres culturelles en général sont plutôt des « aires intermédiaires d’expérience» (TOUBERT 2017 : 6) où l’écriture translingue en français peut révéler son potentiel de « langue-trame de référence partagée à renégocier » (SAUDAN, GAJO 2022 : 31), censée poser de nouvelles questions « à l’intersection entre un texte littéraire et ce que l’on est comme sujet » (TOUBERT 2017 : 7).

2. Les stratégies de lecture

Quelques mots de Nancy Huston sur la notion d’étrangeté repris dans une étude récente sur la francophonie (RICHARD, CAUSA 2022 : 35) montrent encore une fois que dans le cadre du renouvellement des approches à la didactique du FLE le retour du texte littéraire comme laboratoire langagier (PEYTARD 1982) et comme espace à explorer (GODARD 2015) a fait place à une littérature monde (LE BRIS, ROUAUD, 2007) en voie de canonisation, qui par sa spécificité liée à la variété des contextes semble privilégier un point de vue hybride et métissé valorisant les altérités :

Vivre à l’étranger m’a permis d’avoir, vis-à vis du pays d’origine et du pays d’adoption, un petit recul critique : je les perçois l’un et l’autre comme des cultures. La même chose vaut pour la langue : ce n’est qu’à partir du moment où plus rien n’allait de soi – ni le vocabulaire, ni la syntaxe, ni surtout le style ‒, à partir du moment où était aboli le faux naturel de la langue maternelle, que j’ai trouvé des choses à dire. Ma « venue à l’écriture » est intrinsèquement liée à la langue française. Non pas que je la trouve plus belle ni plus expressive que la langue anglaise, mais, étrangère, elle est suffisamment étrange pour stimuler ma curiosité. (HUSTON, 1986 : 14).

Apprendre qu’il est possible d’être francophone tout en conservant son identité linguistique et culturelle d’origine (CHNANE-DAVIN, CUQ 2021 : 81) transforme le français en langue d’échange en prévenant le risque de hiérarchisation : le recours à ces textes vise donc moins les mécanismes de la variation linguistique, qui constituent pourtant une étape importante dans la progression des savoirs, que les composantes qui font la spécificité de l’écriture « en d’autres mots » (AUSONI 2016). Une orientation plus ouverte par rapport aux approches classiques focalisés sur le communicatif et les contextes d’énonciation suppose alors une formation à la diversité linguistique, mais également à une idée du texte littéraire qui fasse abstraction d’une idée très scolaire de la littérature, ancrée à des lectures stéréotypées du texte.

Les démarches de certains auteurs translingues s’inscrivent dans un rééquilibrage interculturel qui renverse la question « Et aujourd’hui qui est l’étranger ? » (KATTAN 2007 : 32) pour interroger la manière dont l’étranger se voit lui-même, et comment il se définit par rapport à l’autochtone. Être bilingue et écrivain français dans ce monde en mouvement, que l’on soit « sédentaire » ou « nomade » (DELBART 2002), que le déplacement soit forcé ou que le retour s’inscrive au bout d’un séjour que l’on espère court, implique en effet, tout d’abord, l’acceptation d’un territoire peu connu. S’engager dans la vie d’un nouveau pays et adopter le français comme langue d’écriture comporte un changement de statut et de dénomination, et des questions surgissent qui remettent en cause l’expérience du décentrement et de la distanciation en tant qu’éléments susceptibles de produire une vision moins monolithique du monde :

Je ne saurais dire, au juste, ce que je ressentis en ce moment ineffaçable : pour qu’il demeurât tel, je dus éprouver que modifier l’accent de la langue maternelle suffisait à infléchir la représentation que tout un chacun s’offre de lui-même, et sa façon de réagir aux sollicitations du monde. Et je suis persuadé que cette modeste expérience à l’intérieur de ma propre langue, fut déjà la prise de conscience des mutations qu’implique l’adoption d’une autre, à laquelle le corps, d’emblée, s’accorde, bien avant que la pensée ne suive. (BIANCIOTTI 1995 : 234-235).

La transformation s’accomplit par degrés, selon l’accueil que l’on reçoit : lorsque l’étranger connaît la langue, il peut tenter le cas échéant de corriger son accent mais l’éventuel apprentissage « humble et persistant » d’un nouvel instrument ne peut qu’aboutir à « la reconnaissance implicite d’une nouvelle naissance » (KATTAN 2007 : 34), seule alternative possible à une position d’intériorité/extériorité, « de décalage, de non coïncidence, d’écart » (ROBIN , 1992: 26) :

Il est possible de parvenir assez rapidement à s’approprier la langue comme instrument d’échange et de communication du quotidien. Cependant, l’acquisition d’une grande liberté d’expression est longue, ardue et parfois pénible. L’aboutissement n’est jamais totalement atteint, mais l’effort ouvre les portes à la lueur et à l’ardeur. Pour un écrivain, il s’agit d’une épreuve fondamentale. J’en ai fait l’expérience. Afin de passer de l’arabe au français comme écrivain, j’ai dû traverser le désert d’un silence qui a duré une vingtaine d’années. (KATTAN 2007 : 34).

Quand Nancy Huston signale qu’elle est « plus attentive qu’un natif aux frottements et aux coïncidences sonores » (HUSTON 1999 : 45) et qu’il suffit d’une petite trace d’accent ou d’une imperceptible maladresse pour faire glisser le masque qu’elle a l’impression de porter au quotidien, c’est le regard sur les relations entre les cultures qui est mis en cause, tout comme dans les mots d’un auteur qui a fait le trajet inverse vers le Grand Nord:

Marcher dans les rues enneigées de Montréal en se posant la question de l’écriture et se voir visiter par une idée comme l’oiseau visite l’arbre où il veut nicher. Comprendre pour soi. Établir un dialogue non plus entre moi et moi, mais entre l’écrivain et l’écriture. Un dialogue se situant dans un autre espace-temps lorsque l’imagination largue les amarres pour aller vers la tempête et se plonger  dans le chaos des vagues immenses où se cache la seconde immortelle qu’il faut renommer. (MOUAWAD 2007 : 190).

Les doutes sur l’usage du texte littéraire en cours de FLE tiennent le plus souvent à une idée obsolète des grands classiques de la littérature ainsi qu’à un manque de connaissance de la place des auteurs francophones sur la scène éditoriale contemporaine, voire à une sorte d’insécurité littéraire qui éloigne l’enseignant des ressources dont il dispose pour construire des repères méthodologiques en fonction de son public. Mais c’est sur les stratégies de lecture qu’il faudrait tout d’abord réfléchir : loin d’inviter les apprenants à la découverte des grands classiques, par exemple, les textes « français facile » qui se veulent des outils pédagogiques « rassurants et motivants » (www.hachettefle.com) n’ont rien de dynamique. Ces versions expurgées qui s’inscrivent dans la tradition des anthologies alimentent depuis longtemps un marché florissant très prisé par l’école italienne, même dans le cadre des études universitaires, bien que ces textes ne questionnent nullement le lecteur sur les références culturelles (DELBART 1994: 133).

Une version très connue de Madame Bovary destinée aux étudiants niveau B2, par exemple, résume en quelques lignes la journée qui suit le bal à la Vaubyessard, un moment qui dans les mots de Flaubert a « fait un trou » dans la vie d’Emma en déclenchant ce mécanisme de déception qui finira par la conduire au refus de son milieu, de son mariage, de la vie même. C’est un des passages les plus évocateurs du roman :

La journée fut longue, le lendemain. Elle se promena dans son jardinet, passant et revenant par les mêmes allées, s’arrêtant devant les plates-bandes, devant l’espalier, devant le curé de plâtre, considérant avec ébahissement toutes ces choses d’autrefois qu’elle connaissait si bien. Comme le bal déjà lui semblait loin ! Qui donc écartait, à tant de distance, le matin d’avant-hier et le soir d’aujourd’hui ? Son voyage à la Vaubyessard avait fait un trou dans sa vie, à la manière de ces grandes crevasses qu’un orage, en une seule nuit, creuse quelquefois dans les montagnes. Elle se résigna pourtant : elle serra pieusement dans la commode sa belle toilette et jusqu’à ses souliers de satin, dont la semelle s’était jaunie à la cire glissante du parquet. Son cœur était comme eux : au frottement de la richesse, il s’était placé dessus quelque chose qui ne s’effacerait pas. (FLAUBERT, ch.VIII)

Le souvenir de ce bal devient « une occupation pour Emma » qui chaque mercredi compte les jours qui la séparent désormais de cette expérience de bonheur : « Et peu à peu, les physionomies se confondirent dans sa mémoire ; elle oublia l’air des contredanses ; elle ne vit plus si nettement les livrées et les appartements ; quelques détails s’en allèrent, mais le regret lui resta » (FLAUBERT, ch. IX). Elle se réveille la nuit rêvant de Paris « plus vaste que l’Océan » qui miroite à ses yeux « dans une atmosphère vermeille », s’achète un plan de la capitale, s’abonne à un journal de femmes, dévore les comptes rendus des représentations, se met à lire Sue, Balzac et George Sand. La réécriture concentre en quelques lignes très référentielles, d’une banalité déconcertante, cette détresse infiltrée à jamais dans une existence qui ne sera plus la même :

Le lendemain, la journée fut sombre. Emma se rappelait tous les détails du jour du bal. Ce souvenir l’occupa pendant plusieurs semaines, puis elle commença à sombrer dans la mélancolie. Elle remplaça la bonne par une jeune fille de quatorze ans, douce et tranquille, Félicité, qui obéissait sans jamais protester.
Elle restait souvent enfermée dans sa chambre. Elle lisait un peu puis se mettait à rêver. Elle désirait à la fois mourir et habiter Paris, ville où, elle pensait, tous les désirs se réalisaient (FAUCARD-MARTINEZ 2019 : 15-16).

3. Diversifier les approches

Transmettre l’histoire littéraire par des stratégies pédagogiques actives qui diversifient l’expérience de la langue suppose moins un apprenant exposé à la langue comme technique à exploiter qu’une réflexion sur son rapport à l’imaginaire véhiculé par cette langue : le Paris fantasmé d’Emma, ses doutes, son incohérence, sa volonté de partir ont le charme universel de la jeunesse, alors que son double en version B2 n’est plus qu’une image d’Épinal :

Chaque matin, à son réveil, elle croyait que la journée serait différente de celle de la veille, qu’il allait se passer quelque chose. Mais rien n’arrivait. L’avenir était un couloir tout noir et qui avait au fond sa porte bien fermée. Elle devint bientôt difficile et capricieuse (FAUCARD-MARTINEZ 2019 : 16).

Proposer une lecture guidée du roman par l’intermédiaire d’une traduction italienne à partir du niveau B1 au lieu d’aplatir ce chef d’œuvre en 1800 mots gommant toute signature d’auteur, n’empêcherait probablement pas chez l’étudiant l’appréciation de la subtilité de l’écriture flaubertienne, dont la complexité permet tout de même le repérage de certaines structures syntaxiques récurrentes qui aident le lecteur à ne pas s’égarer dans les difficultés lexicales. Bien que travailler à développer une attitude interprétative à partir des textes littéraires soit d’après les études spécialisées une démarche censée nous situer « au cœur des objectifs communicatifs » (GODARD 2015 : 89), tout ce que Flaubert laisse dans l’ambigüité et l’ambivalence trouve dans la réécriture une explicitation qui ne fait pas confiance au lecteur. Il suffirait d’évoquer la recherche des « lieux brûlants de l’anecdote » (BARTHES 2000 : 90) qui font le plaisir du texte pour comprendre qu’un « couloir tout noir » risque justement d’être l’avenir où l’apprenant se voit assigné par le texte littéraire simplifié, dans une position d’étranger qui lui interdit toute véritable découverte de l’altérité.

Une plus vaste notion d’éducation à l’altérité étant censée s’élaborer à partir de la valorisation de « la diversité culturelle et identitaire traduite par la langue française » (OUELLON 2010 : 33), on comprend l’importance de ne pas restreindre le corpus aux grands classiques ou à une francophonie médiatisée. Très sensibles à leur positionnement dans le marché éditorial français, les auteurs qui travaillent dans une situation d’entre-deux ne souhaitent pas être considérés comme des porte-parole (KATTAN 2007 : 32) et s’efforcent d’écarter les frontières de « l’abstraction suprafrancophone » (ROUXEL 2010 : 51) pour reformuler le problème non négligeable de l’appartenance culturelle. Cela favorise la création d’un immense texte « métis et métissé, commun et singulier » qui mériterait une place privilégiée « dès les débuts de l’apprentissage et non en fin de parcours » (GRUCA 2010 : 77) :

Être un écrivain francophone c’est être dépositaire de cultures, d’un tourbillon d’univers. Être un écrivain francophone, c’est certes bénéficier de l’héritage des lettres françaises, mais c’est surtout apporter sa touche dans un grand ensemble, cette touche qui brise les frontières, efface les races, amoindrit la distance des continents pour ne plus établir que la fraternité par la langue et l’univers. (MABANCKOU 2007 : 56).

Les auteurs choisis – Nancy Huston, Nord Perdu ; Agotha Kristof, L’analphabète ; Claude Esteban, Le partage des mots ; Vassilis Alexakis, Paris-Athènes, Hector Bianciotti, Le pas si lent de l’amour ‒  proposent une mise en scène de la langue qui mobilise des savoirs antérieurs et des références rattachées à des catégories familières. D’autres récits tirés du volume Pour une littérature monde sont ensuite entrés dans le dossier, notamment ceux de Tahar Ben Jelloun, Maryse Condé, Anna Moï, Brina Svit et Chahdortt Djavann[1] qui témoignent d’un lien affectif, pour des raisons différentes, à la langue française.

Pour ce qui concerne l’écriture romanesque, le jeu entre langue maternelle et langue de l’autre n’en finit pas de surprendre : si certains écrivains cèdent à la tentation de fournir des démonstrations de leur maîtrise linguistique comme s’ils voulaient dépasser leurs collègues « en nuances, en subtilité, en richesse de vocabulaire » (KATTAN 2007 : 34), d’autres redoutent le transfert des images et des métaphores appartenant à leur langue d’origine. Ils craignent les artifices de l’exotisme et choisissent un minimalisme lexical et syntaxique apte à gommer la présence sous-jacente de la langue quittée. Car cette langue n’est pas abandonnée et encore moins « niée ou rejetée » (KATTAN 2007 : 34), ce qui investit leurs démarches autoréflexives d’une puissance séminale :

Ce qui persiste le plus fortement sont les images, celles de la vision initiale du réel. Ainsi, pour moi, la lune est encore et toujours masculine et le soleil, féminin, tels que l’arabe les a imprimés dans mon esprit, même si, obéissant à la grammaire française, j’écris le contraire. (KATTAN 2007 : 35).

Certains auteurs évoquent les enjeux liés à la clarté logique du français, à la précision de son vocabulaire et à la netteté de sa grammaire : « le temps de la phrase est incertain et le sens, qui refuse la précision par amour d’une langue inapte à trancher, flotte au fil des mots », dit Virgil Tanase de son roumain maternel, alors qu’« en français tout est contraire » (TANASE 2006 : 144-145) ; le choix d’écrire en français impose à Brina Svit, écrivain slovène installé à Paris en 1980, un ton direct sans recherche de style, faute de pouvoir entrer dans le corps de la langue : « Elle ne me donne pas mes articulations, ma chair, mes organes, mon souffle… Rien ne m’a été donné. Je dois tout inventer » (SVIT 2009 : 26). Ces éléments reviennent parfois dans les autobiographies langagières sous le signe d’une perte, d’une rupture, voire d’un conflit entre les soucis de la norme et la tentation de l’écart ‒ « Autrement dit, je suis obligée de courir à l’essentiel. Les pirouettes, les fioritures et autres virtuosités verbales ne sont pas pour moi » (SVIT 2003 : 56) – mais le plus souvent la réflexion métalinguistique vise à explorer les « vertus mystérieuses des langues » (ESTEBAN 1990 : 112) :

Il est illusoire de penser qu’on maîtrise véritablement un idiome lorsqu’on se contente de l’appréhender comme un processus de communication et d’échange. Quelque chose de plus subtil relie, pour chaque nation linguistique, la saveur du monde et les signes ; quelque chose de consubstantiel dont la grammaire – du moins la grammaire normative – ne rendra jamais compte et qui, cependant, constitue son essence, son être profond, son génie. (ESTEBAN 1990 : 108)

Il est donc possible de faire travailler les étudiants sur plusieurs composantes du texte au-delà du discours général sur les enjeux de la francophonie linguistique : d’une part les thèmes de l’exil, de l’identité, du voyage, du retour au pays mettent en cause des « référents culturels » (BERTHELOT, 2011 : 42) utiles à la découverte de l’Autre, d’autre part les récits d’apprentissage favorisent une mise en abyme de leur propre situation d’apprenants et peuvent les aider à se forger une image positive du parcours d’appropriation d’une langue :

Avec cela, lorsqu’un écrivain tourne le dos à sa langue et se dirige vers une autre, il confère à cette dernière un esprit distinct, il la purge en quelque sorte, lui insufflant un air nouveau. Non seulement elle aura des chances de s’échapper au torrent des traditions, mais elle adoptera le mouvement de la main qui la façonne. De ces accords et désaccords prend naissance l’univers d’une écriture. (BARON SUPERVIELLE 2007: 49).

Une coprésence effective de langues différentes est le plus souvent déjà en place dans la vie des apprenants, que ce soit pour des raisons familiales ou liées à leurs études : il n’est donc pas rare qu’une situation d’interlangue seconde (MENDONÇA DIAS 2021 : 153) se produise où c’est moins la langue première qui détermine les transferts et les interférences que les autres langues en cours d’appropriation, sans compter le « bilinguisme invisible » (FAUPIN 2021 : 167) des anciens enfants migrants scolarisés en Italie qui gardent une compétence principalement orale de la langue parlée au foyer. Les fausses croyances sur l’implication du bilinguisme comme facteur de retardement dans l’acquisition du langage (HAGÈGE, 2005 : 150) foisonnent encore dans les écoles primaires italiennes, où l’introduction de la langue anglaise ne suffit pas à contrer l’idée courante que l’exposition à une langue autre que l’italien (sauf l’anglais, bien entendu) affecte négativement le développement cognitif des enfants.

Bien que les données disponibles concernant les enfants élevés dans une situation de bilinguisme montrent que beaucoup d’entre eux peuvent parler deux langues dès leur plus jeune âge sans inconvénients particuliers (COOK 2003), et qu’il est impossible de tenir la langue considérée en termes psychologiques comme dominante pour mieux connue que l’autre (HAGEGE 2005 : 49), lorsqu’on recommande l’abandon de la langue soi-disant minoritaire au sein de la famille les enfants développent des stratégies de choix linguistique qui ne sont jamais neutres sur le plan émotionnel (DE HOUWER 1999), et qui peuvent se manifester plus tard en termes d’insécurité linguistique (DE HOUWER 2006). C’est une condition souvent évoquée dans les mémoires des auteurs français d’origine étrangère :

Je me souviens de mes phrases dans la solitude de ma tête. Je me vois me promenant dans la cour de l’école, toujours seule, toujours dans ma bulle. Je remuais un tas de mots dans la tête, je formais des phrases, je prenais la parole en public et expliquais à tous que je n’étais ni muette ni étrangère ni martienne mais préférais juste garder cette nouvelle langue pour moi (MADJIDI 2017 : 121).

Le parcours d’études en langues et littératures étrangères se révèle alors une chance de sortir de ces mécanismes d’auto-exclusion produits au fil du temps par des attentes multiples et contradictoires : l’alternance codique ou la maîtrise dissymétrique qui avaient autrefois un impact si négatif sur l’image de soi deviennent un trait spécifique de l’identité langagière personnelle, et l’aptitude à la médiation sera le réflexe le plus probable du réinvestissement identitaire. Comme le précise le CECR 2021, en didactique des langues étrangères le plurilinguisme est à prendre en compte « comme un fait sociologique et historique, comme une caractéristique ou une ambition personnelles, comme une philosophie ou une approche éducatives ou – fondamentalement – comme un objectif sociopolitique destiné à préserver la diversité linguistique », et sa valorisation renforce la conscience métalinguistique, interlinguistique, « voire, si l’on peut dire ‘hyperlinguistique’ » de l’apprenant (CECR 2021 : 31).

4. Valoriser le plurilinguisme

Dans les cours de Master où les étudiants disposent d’un répertoire assez vaste de ressources langagières et culturelles, la valorisation d’un plurilinguisme inhérent à la formation proposée serait donc à privilégier au lieu d’envisager l’étude de la langue française en fonction uniquement utilitaire. La compétence plurilingue implique une certaine flexibilité dans le passage d’une langue à l’autre, aussi bien dans la compréhension des textes que dans la médiation entre individus, et une disposition à mettre en œuvre tout un outillage langagier qui favorise l’intercompréhension linguistique. Dans ce cadre, toute forme d’interaction entre l’enseignant et l’apprenant, ou entre les apprenants, vise à une (co)construction du sens qui puise dans les répertoires plurilingues et pluriculturels (CECR 2021 : 30) : l’apprentissage sera alors l’occasion d’encourager une mise en dialogue de la culture commune, au-delà d’une ancienne idée de performativité, pour affirmer les valeurs plurielles qui se construisent autour des savoirs partagés.

Ce projet pédagogique articulé sur deux semestres (60 heures de cours au total, avec deux séances hebdomadaires de 120 minutes) a d’abord bénéficié d’un cadrage général sur l’histoire et les instances de la Francophonie institutionnelle, ainsi que sur le récit contemporain translingue comme document qui se charge de représenter le réel. Les écrivains ont été situés dans leur contexte géographique pour éclairer les références historiques et culturelles représentées dans leurs récits, et l’attention a été portée sur les itinéraires langagiers individuels, d’autant plus intéressants que certains auteurs se trouvent confrontés à l’impossibilité de sortir complètement de leur langue maternelle. Qu’ils pratiquent l’alternance ou le mixage des langues, qu’ils s’autotraduisent ou qu’ils confient leurs œuvres à des professionnels de la traduction, ces écrivains ressentent souvent une sensation de précarité liée à un questionnement identitaire : ils ne sont pas le produit d’une seule culture mais construisent et élaborent une identité nouvelle par des stratégies diversifiées, selon les besoins et les circonstances, tout en gardant un regard personnel sur le pays, la langue et la culture d’adoption.

Quelques exemples : c’est en rédigeant en français son premier roman que Virgil Tanase réalise que cette langue est une danse « précise et rythmée sous le jour des projecteurs qui éclairent impitoyablement le moindre faux pas » (TANASE 2006 : 145) ; ce n’est qu’en français, âme inaltérable d’un monde « ultraterrestre » qui pendant l’enfance la sortait de « l’immonde réalité de la guerre et de ses cortèges funèbres » (MOÏ 2007 : 247), qu’Anna Moï peut enfin raconter son histoire ; c’est par « des mots et des mets » (THUY 2013 : 145) que Kim Tuy se réapproprie en français la précision et la poésie des saveurs vietnamiennes de son enfance ; et c’est en français que le poète François Cheng met en œuvre ce travail de mémoire qui après une quête silencieuse aboutira à l’écriture tardive de ses romans (CHENG 2002). Pour montrer la complexité des écritures translingues, quelques pistes d’activité d’appropriation et de réinvestissement ont donc été proposées aux apprenants afin de les guider au repérage de certains thèmes récurrents déclinés dans les textes de manière transversale :

  • Changer de langue d’écriture : causes et conséquences.
  • Calques, interférences et mélanges linguistiques : les défis du bilinguisme.
  • Les raisons de l’autotraduction.
  • Le bilinguisme tardif et son rapport à la création littéraire.
  • Les difficultés liées à l’alternance des codes linguistiques et culturels.
  • La peur d’oublier sa langue maternelle.
  • Devenir écrivain francophone : une étiquette ?
  • Le masque, l’imitation, le faire-semblant : le théâtre de l’exil.
  • Langue mère, langue marâtre, langue ennemie : mémoires d’enfance.
  • Une petite trace d’accent : les erreurs, les hésitations, les inexactitudes.

L’inverse est également possible : sur la base de quelques citations choisies per l’enseignant, l’apprenant passe de la compréhension des événements et des expériences qui composent l’intrigue à l’appréciation des implicites et des subtiles distinctions de style, ce qui revient d’ailleurs à l’idée de lire comme « activité de loisir » évoquée dans le CECR (2021 : 61). Bien que plusieurs aspects culturels soient mis en question dans ces textes qui favorisent l’organisation de débats sur les différences/ressemblances, les stéréotypes et les représentations négatives ainsi que les jugements et les généralisations, notre perspective pédagogique visait surtout une réflexion sur le bilinguisme, voire le plurilinguisme, par le biais d’une écriture qui éloigne les replis identitaires dans la mesure où la capacité de « penser la langue et notre relation à elle » (GODARD 2015 : 271) transforme l’appropriation en « lieu d’une élaboration de représentations différentielles » (MARTINEZ 2021 : 40).

Le récit de l’apprentissage du français à partir d’une situation singulière encourage chez l’apprenant les démarches autoréflexives sur la difficulté que pose l’adoption d’une langue étrangère, mais au-delà du défi linguistique plus ou moins apprivoisé c’est surtout la mise en cause identitaire qui active la réponse interculturelle. Quelques exemples : « Moitié française moitié je ne sais pas » annonce Brina Svit après avoir quitté le sol slovène, bien plus solide sous ses pieds, pour se retrouver dans un lieu toujours nouveau où « chaque phrase est une aventure » (SVIT 2007 : 255) ; « En essayant d’adopter une élocution, je m’imprégnais d’une manière, non pas d’être, mais de se comporter », admet Hector Bianciotti (BIANCIOTTI 1995 : 234) quand il réalise que cette « manière » n’est pas la sienne ; « Les mots avaient besoin de douceur, de temps, de vécu, d’expérience, d’attention, d’humilité ; ce n’était pas en les psalmodiant comme une abrutie qu’on pouvait les apprivoiser » considère Chahdortt Djavann après avoir acheté le Bescherelle, « douze mille verbes, douze mille cauchemars » (DJAVANN 2007 : 288) ; « Décidément, en vivant à cheval sur deux pays, j’ai réussi à rater tout ce qui s’est passé d’important dans l’un comme dans l’autre » (ALEXAKIS 2006 : 141) répond Vassilis Alexakis à ceux qui demandent les raisons de ses autotraductions.

Cette poétique du ratage si évocatrice dans l’écriture translingue pour le potentiel créatif qu’elle porte en soi, ces phases dramatiques où il arrive de se sentir « analphabète » (KRISTOF 2004) aboutissent enfin à la possibilité de « creuser dans le français universel un petit trou, un petit univers, dans lequel on est chez soi et on se sent à l’aise » (KOUROUMA 1997: 167). La salle de cours peut alors se transformer en espace d’échange idéal où l’identité des jeunes « en évolution et en recomposition » (CUQ 2003 : 123) trouve ses repères culturels et émotionnels par l’étude d’un corpus textuel qui valorise leurs trajectoires différentes, et il n’est pas imprudent d’affirmer que des étudiants éduqués à la diversité linguistique auront davantage de chance d’être des professeurs capables de transmettre le goût de la découverte, et de créer des séances où le texte littéraire s’impose comme un chantier « à la croisée des langues » (GAUVIN 1997) :

C’est un fait pourtant. Encore aujourd’hui, je fais pas mal de fautes. Je confonds, par la prononciation, « cadeau » et « gâteau ». J’ai horreur des jeux de mots. Je ne connais pas le nom des arbres, des fleurs, des oiseaux, tous ces mots qu’on apprend quand on est enfant. Je viens juste d’apprendre par mon fils qui a neuf ans ce qu’est la rose des vents. Je suis incapable de faire une multiplication en français. Les premières années de mon séjour à Paris, je passais une partie de mon temps à enregistrer en cachette les conversations des gens dans les bistrots, le métro, les salles d’attente. Écrire en français me demande plus de travail qu’à un Français. (ALEXAKIS 2006 : 139-140).

5. Conclusions

Introduire la littérature dans l’enseignement du FLE ne correspond donc plus à un étalage passif d’érudition ; c’est plutôt l’occasion de travailler sur l’imaginaire d’une langue étrangère qui représente le « devenir-autre » évoqué par Deleuze : « La littérature opère une décomposition ou une destruction de la langue maternelle, mais aussi l’invention d’une nouvelle langue dans la langue par création de syntaxe » (DELEUZE 1993 : 15). Chaque «faux bilingue» ‒ remarque d’ailleurs Nancy Huston en faisant allusion au bilinguisme tardif qui à chaque phrase « bifurque, trifurque » sa pensée (HUSTON 1999 : 47) ‒ se rend compte d’avoir une « carte spécifique de l’asymétrie lexicale » (HUSTON 1999 : 61) où se cachent les analogies et les différences entre le système source et le système cible. Le texte littéraire quitte alors son rôle de « supplément culturel » (PEYTARD 1989 : 7) pour se faire médiateur entre la langue des origines et les intraduisibles qui guettent notre sentier, ces «symptômes» de la différence des langues « qu’on ne cesse pas de (ne pas) traduire » (CASSIN 2022 : 54) :

Il faudrait dès lors pouvoir convaincre les professeurs, inspecteurs, ministres et éditeurs qu’au cœur des humanités se situe la traduction, que la traduction s’expérimente grâce aux bilingues, et qu’il n’y a pas qu’une, mais une pluralité de traductions. (CASSIN 2022 : 183).

La revendication fréquente d’un choix impossible, ou la nécessité déclarée d’un va-et-vient entre les deux pays, les deux cultures et les deux langues de référence deviennent l’instrument d’une quête et d’un questionnement sur le potentiel d’un entre-deux encore stigmatisé dans certains milieux. Ce n’est donc pas tellement la « caractéristique FLE » (GODARD 2015 : 286) des auteurs en question qui a déterminé le choix de proposer leurs textes mais la possibilité de familiariser les étudiants avec l’idée que « dans une langue étrangère aucun lieu n’est jamais commun (tous sont exotiques) » (HUSTON 1999 : 46) :

La littérature nous autorise à repousser ces limites, aussi imaginaires que nécessaires, qui dessinent et définissent notre moi. En lisant, nous laissons d’autres êtres pénétrer en nous, nous leur faisons de la place sans difficulté – car nous les connaissons déjà. Le roman, c’est ce qui célèbre cette reconnaissance des autres en soi, et de soi dans les autres (HUSTON 1999 : 107).

Ce mouvement vers l’hospitalité langagière fait de cette écriture qui « dépasse le clivage littérature française/littératures francophones » (AUSONI 2018 : 50) un « espace-test » (KELLER-GERBER 2019 : 50) où l’étrangeté est mise en mots: en proposer la lecture en classe de FLE selon une « perspective francophone » (DUMORTIER 2022) qui efface toute opposition éventuelle entre centre et périphérie, pureté et métissage, rejet et appropriation (NARCY-COMBES, NARCY-COMBES 2021 : 238), nous semble adoucir le caractère irrémédiable des difficultés d’appropriation. Cette transversalité désamorce le réflexe de l’accumulation de notions pour stimuler chez l’apprenant une « expérience de liminarité » (KELLER-GERBER 2019 : 51) qui encourage un regard interculturel. Au lieu de se concentrer sur l’objectif ingrat de « parler comme un Français » (ROSEN 2005 : 313) il pourra alors mesurer et verbaliser les décalages pour affiner ses connaissances et voyager léger partout dans le monde :

J’ai perdu trop de temps à commenter le fait que j’écris en français. Et à débattre du fait que ce n’est pas ma langue maternelle. Finalement, tout cela me paraît aujourd’hui assez théorique, et même un brin ridicule. Cette langue française s’est infiltrée dans mes neurones, et son chant rythme mon sang. Je pourrais reconnaître sa cadence dans une ruelle obscure du Bornéo. […] J’écris et je lis en français partout dans le monde. C’est cette langue qui m’accompagne en voyage. Je voyage léger, bien sûr. (LAFERRIÈRE 2007 : 87).

 

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[1] Tahar Ben Jelloun, La cave de ma mémoire, le toit de ma maison sont des mots français ; Maryse Condé, Liaison dangereuse ; Anna Moï, L’autre ; Brina Svit, Moitié française moitié je ne sais pas ; Chahdortt Djavann, De l’apprentissage du français à l’écriture.

 

 


Per citare questo articolo:

Simona MUNARI, « Pour une approche interculturelle : le texte littéraire translingue dans l’enseignement du FLE », Repères DoRiF, numéro hors-série Varia, DoRiF Università, Roma, febbraio 2024, https://www.dorif.it/reperes/simona-munari-pour-une-approche-interculturelle-le-texte-litteraire-translingue-dans-lenseignement-du-fle/

ISSN 2281-3020

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