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Yannick HAMON

Problématiques émergentes de la FAD dans son développement historique jusqu’à la didactique d’urgence en situation de pandémie

 

Yannick Hamon
Università Ca’ Foscari Venezia
yannick.hamon@unive.it


Résumé

Notre étude s’inscrit dans le cadre des ateliers FLE coorganisés par le Do.Ri.F et la Fédération des Alliances Françaises d’Italie. Ces ateliers, qui ont été proposés depuis 2018 aux enseignants du secondaire, ont pour objectif d’ouvrir le champ des possibles en termes de pratique mais aussi et surtout de fournir des bases théoriques et praxéologiques permettant un dialogue entre le monde de l’enseignement supérieur et celui de la science et de l’université. La première édition consacrée à l’utilisation du théâtre avait alors réuni à Rimini puis à Cagliari de nombreux praticiens, qui ont ensuite partagé sur le site de la revue Repères les scénarii pédagogiques conçus dans ce cadre. L’expérience a ensuite été renouvelée sur le thème de la gestion de l’erreur. Pour ces deux thèmes, les pistes proposées concernaient aussi bien les ressources et les outils traditionnels que les instruments TICE pouvant être utilisés en présentiel enrichi.
Dans une première partie, nous resituons la Formation à Distance (désormais présentée sous son acronyme FAD) dans son développement historique en nous penchant plus spécifiquement sur l’enseignement des langues et du FLE en particulier. Nous nous efforçons de mieux cerner cette modalité d’accès aux savoirs en mettant l’accent sur les étapes qui ont pu structurer un champ désormais incontournable.
La deuxième partie se penche sur les problématiques soulevées par la FAD (notamment la question de l’autonomie), réinterrogées suite à l’expérience de la distance subie (et non plus choisie) permettant par contraste de mieux saisir les caractéristiques du présentiel.
Enfin, dans la troisième partie, nous soulignons que ces problématiques imposent de mieux préparer les enseignants à s’approprier les principes théoriques et pratiques à même de maintenir la motivation des apprenants, notamment en réutilisant les méthodes et approches mobilisées en présentiel enrichi qui ont pu faire l’objet de formations préalables.

Abstract

This study is part of the FSL workshops co-organized by the Do.Ri.F and the Federation of Alliances Françaises in Italy, which have been offered to secondary school teachers since 2018. These workshops aim to explore (oppure open up debate on) the relationship between the world of higher education and that of science and university in theoretical, praxeological, and practical terms. In the first edition, which was focused in the use of theatre acting skills (improvisation, natural expressivity, refinement of the language, confidence increase) teachers from Rimini and Cagliari shared the pedagogical units conceived in this framework (now available on the website of the journal Repères). The second edition was instead devoted to the theme of error management. In both themes the main focus was on both traditional resources and ICT instruments that could be used in an enriched classroom setting.
The first part of this study discusses distant learning in terms of its historical development, with a focus on language teaching, especially French as a foreign language.
The second part focuses on the problems related to distant learning (in particular the issue of autonomy), which have been re-examined in light of the recent experience due to the pandemic for a better understanding of the characteristics of the face-to-face setting.
The final part emphasizes the need for teachers to be adequately trained so as to acquire theoretical and practical competence that enable them to maintain learner motivation, in particular by reusing the methods and approaches used in ICT enriched face-to-face teaching.


Introduction

Cet article s’inscrit dans un cycle d’ateliers proposés en ligne par le Do.Ri.F et la Fédération des Alliances Françaises d’Italie sur la plate-forme Zoom aux enseignants de FLE du secondaire en Italie. Lors de ce cycle d’ateliers, nous avons proposé une intervention inaugurale de nature interactive et participative, pendant laquelle il s’agissait de revenir sur l’histoire et l’évolution de la formation à distance pour l’enseignement du Français Langue Étrangère. Le présent article ne constitue pas une transcription de l’intervention dans sa forme dialogale mais une réflexion rétrospective qui s’appuie également sur des données et des recherches plus récentes. Notre propos, lors de l’atelier destiné aux praticiens, avait pour objectif de familiariser ces derniers aux spécificités de la FAD sous les angles diachronique et synchronique, l’intention étant surtout de faire émerger des questionnements et des problématiques que les enseignants ont pu rencontrer lorsqu’ils ont dû mettre en œuvre des pratiques d’enseignement/apprentissage du FLE à distance.

À partir de février 2020, sur la base des données épidémiologiques, les autorités italiennes ont demandé aux établissements scolaires et universitaires de ne plus accueillir d’élèves et de se replier sur des solutions d’enseignement à distance pour assurer la continuité pédagogique. Ce passage à une modalité pour laquelle personne n’était préparé (élèves, familles, enseignants, direction des établissements, gestion territoriale et ministère compris) a engendré des situations très inconfortables (parfois invivables), également dues aux disparités d’équipement et de connexion, qu’il s’agisse de l’équipement des familles et/ou des infrastructures numériques. Ajoutons à ce cadre des situations de détresse économique, des parents devant s’occuper de plusieurs enfants et devant télétravailler en même temps, l’absence de formation de certains enseignants pour l’usage des technologies en présentiel enrichi et nous obtenons un tableau de la situation d’urgence dans laquelle nous avons dû naviguer à vue, tels les pêcheurs micronésiens de Hutchins (1983). Un contexte qui explique les résultats inégaux de cette continuité pédagogique, qu’il s’agisse du malaise des praticiens, du décrochage des élèves et des souffrances des parents d’élèves. Les Formations à Distance sont normalement conçues comme telles en amont avec des professionnels formés et préparés, qui adoptent une progression et un séquençage des parcours déterminés en amont de la formation. Toutefois, ces cursus distants, conçus comme tels, se signalent par de forts taux d’abandon1. On peut donc facilement imaginer le résultat de dispositifs conçus dans l’urgence avec l’anxiété et le stress causés par la pandémie. Pourtant, dans certains contextes, dans certains établissements et dans certains cours, sans doute là où l’utilisation des technologies était déjà présente pour renforcer les parcours en présentiel, le passage à la FAD a permis d’assurer le suivi des élèves et de pallier le mal-être diffus, le manque de présence physique, les pertes de contact et de points de repère sur le plan relationnel, qu’il s’agisse des rapports enseignant-apprenants ou de la socialisation entre pairs. Des groupes d’enseignants ont su créer des chaînes de solidarité sur des groupes Facebook ou WhatsApp pour partager des idées, des ressources, des outils, des solutions. Nous aurions donc tort de dresser un tableau apocalyptique de la crise : en 2020 dans l’urgence, ici et là, la créativité des praticiens a donné lieu à des approches intéressantes qui ont sans doute été ré-exploitées ensuite en 20212. En tout cas, au creux des situations de détresse a émergé un potentiel techno-pédagogique significatif : la visioconférence a permis, là où elle a été utilisée, de maintenir des interactions orales en synchrone (avec les petits accidents techniques que nous connaissons bien) et d’autres outils tels que les plateformes LMS ont permis d’échanger des documents, de travailler en modalité collaborative, en résolution de problèmes, voire en classe inversée. Toutefois, pour permettre à un plus grand nombre d’enseignants de s’approprier ces outils, il fallait aussi déployer un dispositif de formation continue répondant à leurs besoins spécifiques et fournissant un cadre méthodologique solide. C’est précisément ce qui a été mis en œuvre avec les ateliers FLE consacrés à la FAD. Et puisque nous avons évoqué la nécessité d’un cadre, il convient de dresser un bref panorama historique de l’enseignement à distance, des cours par correspondance à la sophistication technologique d’aujourd’hui.

1. Bref historique de la Formation à distance en langues et en FLE en particulier

1.1 Bref panorama historique de la FAD en France et émergence de la problématique de l’échec

Nous nous appuierons sur la synthèse établie par Glikman (2002) et sur un article plus récent publié par cette même auteure (GLIKMAN, 2014) pour rendre compte du chemin parcouru par la formation à distance jusqu’à la crise sanitaire de 2020, qui a contraint les établissements scolaires et universitaires à l’utilisation massive des moyens employés en Italie pour la Didattica a Distanza. Tantôt décriée dans les témoignages des apprenants et enseignants, tantôt conçue comme une solution possible pour assurer la continuité pédagogique, la FAD tient ses origines du développement de la sténographie d’une part et du développement du timbre-poste au XIXᵉ siècle (GLIKMAN, 2002 : 22). Il n’est pas question ici de parcourir en détail toute l’évolution de la FAD, des cours par correspondance à l’avènement d’Internet. Nous nous efforcerons simplement de souligner les principales étapes en mettant en évidence les objectifs initiaux et les interrogations soulevées par ce qui procédait au départ d’une volonté de promouvoir l’égalité sociale en permettant aux publics n’ayant pas accès à des structures éducatives de bénéficier d’une couverture pédagogique (zones rurales, territoires enclavés3).

Après les premiers pas des cours par correspondance en Angleterre, en Australie et au Canada, qui s’adressaient avant tout aux adultes, les premières années du XXᵉ siècle voient aux États-Unis la naissance des premières institutions scolaires à distance, d’abord privées, puis publiques. En France, la création en 1939 du CNTE (Centre National de Télé-Enseignement) qui deviendra ensuite le CNED (Centre National d’enseignement à Distance) constitue une date importante car cette modalité éducative et l’institution qui en assume le déploiement a joué en France un rôle important lors de la crise sanitaire. Le développement de la FAD suit alors les évolutions technologiques et ses finalités oscillent entre une réelle volonté de démocratiser l’enseignement et un pragmatisme libéral fortement orienté sur la volonté de former avant tout aux métiers porteurs de l’économie (GLIKMAN 2002 : 24). En ce sens, le développement de la FAD participe des insuffisances du système éducatif “traditionnel” et vient compenser les manques de ce dernier en formation initiale, tandis qu’en formation continue des dispositifs légaux (le congé formation par exemple) viendront appuyer la mise en place des parcours professionnels à distance4.

Progressivement, les formations générales diplômantes viennent s’ajouter à l’offre de formation et le courrier subsiste encore comme médium de transmission des contenus pour les élèves (on ne parle pas encore d’apprenants au début des années 1960) et des devoirs à rendre aux tuteurs. Le taux d’échec est très élevé5 parce que la didactisation des supports est fortement limitée et que le volume de connaissances à assimiler nécessite pour les élèves une organisation sans faille (GLIKMAN, 2014). Les chercheurs français en sciences de l’éducation font remarquer :

La question de la complétude et de l’abandon de la formation reste une préoccupation majeure. Bien que les données disponibles soient encore limitées et difficiles à interpréter, un taux élevé d’abandon situé entre 70 % et 90 % a été rapporté pour tous les publics et niveaux, et toutes formations confondues, notamment internes, universitaires, professionnelles en France. Quant à la réussite qui conduit à l’obtention d’un diplôme ou d’un certificat, les données de plusieurs universités spécialisées dans l’apprentissage en ligne, notamment en Thaïlande, en Inde, en Angleterre et en France, ont révélé que le taux reste faible et se situe entre 17 % et 48 %.

POELLHUBER, CHOMIENNE et KARSENTI (2008)

L’arrivée de la télévision éducative constitue selon Glikman (2002 : 32) un premier tournant avec l’apparition d’un médium populaire permettant de dynamiser les apprentissages, de les rendre plus vivants et, partant, de contribuer fortement à la démocratisation de l’accès aux savoirs, notamment en Italie, avec l’ambition italienne dans les années 1960, d’alphabétiser une partie de la population qui n’avait pas encore eu accès à l’éducation. Toutefois, d’après l’auteure, des limites apparaissent, qu’il s’agisse de contenus (perçus comme trop difficiles ou simplement inadaptés aux niveaux des apprenants) ou bien du support télévisuel (plus conçu comme outil de distraction que comme vecteur de transmission de savoirs). C’est ensuite l’avènement de l’informatique qui viendra parachever l’évolution de la FAD (développement de la multimodalité) avec, en figure de proue, l’utilisation des nouveaux potentiels d’interaction induits par Internet. Bien entendu, cette dernière évolution ne va pas sans susciter des interrogations légitimes : degré variable d’appropriation d’une génération à l’autre, risques de surcharge cognitive (SWELLER, VAN MERRIËNBOER, PAAS, 1998) connexions et équipements inégaux des usagers… les obstacles à une pleine réussite sont légion. Enfin, contrairement à la FAD mise en place pour éviter la propagation du virus, subie par les enseignants et les apprenants, dans ces années où se développent les dispositifs informatiques, puis numériques, il s’agit toujours d’une FAD où les apprenants sont volontaires et décident d’adopter cette modalité d’apprentissage pour entreprendre un cursus éducatif complet ou un module de formation. C’est là une différence énorme par rapport à ce qui a été vécu en 2020.

1.2 L’enseignement à distance pour les langues vivantes et le FLE : de l’adjuvant en hybride enrichi à la remédiation d’une forte carence dans la situation éducative

Si l’on souhaite suivre aujourd’hui un cursus de langues vivantes à distance et de FLE en particulier, l’offre est assez pléthorique, qu’il s’agisse de solutions payantes privées et publiques ou de solutions gratuites (des “modules” de formation) sur le principe des MOOCs. La sophistication des dispositifs numériques disponibles (plateformes LMS, outils de visioconférence en particulier) a progressivement rendu possible la mise en place d’activités et de tâches authentiques interactives pour l’ensemble des compétences visées, y compris en production orale. Dans la mesure où Glikman (2002) signale l’existence de dispositifs d’apprentissage épistolaires, nous pouvons raisonnablement émettre l’hypothèse que des cours par correspondance pour l’enseignement des langues ont pu exister au début du XIXᵉ siècle et au XXᵉ siècle privilégiant surtout l’écrit, la traduction et la grammaire. Pour la prise en charge des compétences de production à l’oral, Tropis (2005) fait état de l’expérimentation d’un dispositif par téléphone dans l’Académie de Toulouse au milieu des années 1990, ensuite converti en dispositif numérique. Des cours ont également pu être dispensés en recourant aux disques vinyles dans les années 1950, à la télévision, à la radio, mais surtout à Internet dans le cadre d’apprentissages informels. En effet, le développement de la Toile a permis la création de nombreux contenus, sur TV5 ou Radio France International (RFI) mais aussi la publication de blogs ou de groupes dédiés sur les réseaux sociaux qui peuvent être aussi bien exploités en autodidaxie complète qu’en présentiel enrichi. Sur TV5 ou RFI des programmes d’autoformation (sans certification) sont proposés et distinguent des rubriques destinées aux apprenants d’une part et aux enseignants d’autre part.

Cette notion de présentiel enrichi et les compétences qui lui sont associées nous amènent à distinguer la typologie des dispositifs de formations proposées par le référentiel de compétence Competice6 (HAEUW, 2004). Les situations dites en « présentiel enrichi » sont des situations d’enseignement ou de formation dans lesquelles il y a un usage de supports multimédias en présence des élèves. Elles se différencient des situations dites en « présentiel amélioré » qui sont des situations d’enseignement ou de formation réalisées en amont et/ou en aval à distance en lien avec le présentiel. Elles se différencient également des situations dites mixtes «présentiel»/«distance» qui sont des situations d’enseignement ou de formation où des activités s’effectuent en dehors de la présence physique du formateur et peuvent conduire à du « présentiel allégé », à du « présentiel réduit » ou du « présentiel quasi inexistant ». Si les deux dernières catégories font moins l’objet de formations de formateurs (avant la crise sanitaire de 2020, le besoin s’était encore peu fait sentir), les formations pour le présentiel enrichi se sont développées de façon significative dès le début des années 2000 et ont pris de l’ampleur à partir de 2010, permettant ainsi aux praticiens de disposer d’une méthodologie solide dans leurs pratiques de classe en présentiel recourant aux ressources numériques. Ce bagage a sans nul doute été précieux pour la mise en place de scenarii d’apprentissage à distance.

Enfin, en plus de ces typologies basées sur les situations d’usage des technologies, il convient de distinguer l’apprentissage à distance informel en autoformation complète et non sujette à diplomation ou certification (comme dans le cas des méthodes Berlitz ou Assimil) et l’apprentissage à distance structuré, dispensé par un organisme privé ou public et des enseignants tuteurs formés habilités à délivrer des diplômes ou des certifications. À cet égard, il est important de souligner que l’institutionnalisation de la FAD constitue une étape structurante pour sa légitimation. En effet, qu’il s’agisse du CNED en France ou de la mise en place de structures officielles en Afrique francophone, la FAD se trouve renforcée par sa formalisation institutionnelle, qui implique une définition claire des objectifs d’apprentissage, du séquençage et de la progression des formations proposées, des processus qualité ainsi qu’un plan de formation de formateurs solide, à même de garantir des dispositifs sérieux, étudiés et conçus en fonction des besoins de formation des apprenants. Si dans le cas de l’Italie en 2020, la réponse institutionnelle répond à des besoins immédiats et imprévus (la crise sanitaire), la mise en place de la FAD par les établissements éducatifs scolaires ou universitaires peut soutenir, dans le cas de l’Afrique francophone (KANE, 2008), un véritable plan de développement pour l’économie et la possibilité pour des apprenants ne pouvant accéder à des formations certifiantes en présentiel de bénéficier d’apprentissages formels reconnus, de formations diplômantes. Ainsi, les formations à distance formelles et institutionnalisées contribuent à structurer et à légitimer le champ de la FAD.

Or, les écoles secondaires italiennes qui nous intéressent aujourd’hui s’inscrivent dans ce cadre puisqu’il s’agit d’organisations publiques délivrant un diplôme en fin de cycle (pour l’ensemble des disciplines) et pouvant sanctionner l’échec d’un élève en plusieurs matières par un redoublement. Les dispositifs d’enseignement à distance mis en place dans l’urgence faisant l’objet de notre formation s’inscrivent donc dans le cadre d’apprentissages formels et diplômants, ce qui devrait a priori garantir la participation des élèves et leur implication. Pourtant, comme nous le verrons plus loin, ce n’est pas le cas. Le repli sur les solutions de FAD en 2020 et 2021 relève d’une distance non intentionnelle, subie aussi bien par les apprenants que par les enseignants. Or, si les FAD formelles impliquant un fort degré d’autonomie préalable (chez les apprenants et les enseignants) se signalent déjà par des taux d’abandon significatifs des candidats, l’on peut aisément imaginer les points critiques engendrés par une distance subie…

2. Les problématiques transversales de la FAD

2.1 L’autonomie, entre distance souhaitée et distance subie

Dans le cadre de la crise sanitaire, le concept d’autonomie intéresse aussi bien les apprenants que les enseignants et s’applique à deux objets distincts de façon concomitante : les apprentissages langagiers et l’appropriation technologique. En didactique des langues, le but ultime de tout processus d’enseignement-apprentissage est de rendre les apprenants autonomes pour communiquer en langue étrangère. Cette autonomie s’acquiert également tout au long du parcours d’apprentissage au moyen de stratégies cognitives, métacognitives et socio-affectives qui nécessitent un ensemble de compétences didactiques. En FAD, l’orchestration de ces compétences au moyen d’artefacts informatiques se caractérise par une double attention : d’une part, l’animation des dynamiques d’interaction et d’autre part, la gestion psycho-affective des carences introduites par une médiation des voix et des corps par écrans interposés.

Plus largement, pour les deux objets (apprentissages langagiers et appropriation technologique), se pose la question de l’autonomie préalable. Tous les enseignants sont-ils en mesure de s’adapter à l’évolution constante des outils, d’analyser le potentiel de chacun de ces outils à des fins didactiques ? Quel degré d’autonomie cette appropriation suppose-t-elle de la part des apprenants et des enseignants ? Quelles sont les technologies maîtrisées par la fameuse génération Millenial ? Peut-on envisager une adaptabilité parfaite des élèves du secondaire aux outils mobilisés à des fins pédagogiques ?

Rappelons en premier lieu que les problèmes posés par le recours aux TICE, sans forcément qu’il s’agisse d’apprentissages à distance peuvent être d’ordre cognitif (CHAROUD et DESSUS, 2017), d’ordre psychologique (abandon d’apprenants dans le cadre de l’e-learning, frustration des enseignants liée au temps d’investissement, aux risques de dysfonctionnement), d’ordre technique (manque d’appropriation des outils, techno-dépendance), et enfin d’ordre institutionnel (problème de valorisation des temps de travail sur machine, poids des programmes le cas échéant, budgets pour la formation de formateurs). Les problèmes soulevés par la question de l’autonomie des acteurs pour l’utilisation des technologies dans le contexte de l’autoformation suscitent enfin des interrogations majeures :

  • d’ordre éthique : avons-nous vraiment conscience des effets produits par nos actions dans un environnement en réseau ?
  • d’ordre épistémologique : de quelles valeurs, quels systèmes de contrôle usons-nous pour vérifier la fiabilité, la vérité de ce que nous trouvons sur Internet ?
  • d’ordre logique : peut-on envisager les TICE et l’autonomie à la fois comme fins et moyens ?
    (LINARD, 2003)

Le problème de l’autonomie tel que le signale Linard est toujours d’actualité et ne semble pas avoir encore trouvé de solutions. La complexité induite par l’autonomie des acteurs de la relation pédagogique dans le contexte d’une distance forcée et de dispositifs mis en place dans l’urgence va bien au-delà de l’appropriation technique. Il est demandé aux enseignants d’exploiter tout le potentiel didactique des outils numériques pour autonomiser les apprenants, alors qu’ils maîtrisent à des degrés divers, selon leur expérience et leur formation, la gestion techno-pédagogique des artefacts et de leur potentiel interactif. Or, compte tenu de la complexité des outils et des problèmes qu’ils soulèvent, compte tenu des phénomènes produits ou accentués par ces outils (cognitifs et affectifs), nous pouvons aisément concevoir la difficulté pour les enseignants de créer et d’orchestrer, dans l’urgence, des tâches langagières à distance. De plus, rappelons-nous que cette distance n’est pas souhaitée mais subie, qui plus est dans un contexte où les TICE ne sont plus des adjuvants introduits et médiés par le formateur en classe mais les seuls et uniques canaux de communication avec les élèves confinés chez eux.

En théorie, pour que l’enseignant puisse autonomiser, responsabiliser ses apprenants, les guider dans une utilisation raisonnée des artefacts, il faudrait qu’il soit lui-même autonome non seulement dans le maniement des outils mais aussi dans le choix des activités et de la progression. Pour exprimer la problématique simplement, il s’agirait pour l’enseignant de rendre l’apprenant autonome avec ou sans TICE et d’être autonome dans des environnements numériques en réseau pour en exploiter le potentiel “autonomisant”. Mais l’autonomie de l’enseignant en termes de compétences techno-pédagogiques suppose qu’il ait reçu une formation qui le lui permette. Or, c’est rarement le cas. En outre, dans le cas qui nous intéresse, personne ne pouvait prévoir à la rentrée 2019 que des besoins émergeraient pour mettre en place des solutions d’enseignement uniquement à distance en substitution totale de l’espace scolaire soudain interdit d’accès.

Il est évident que les établissements scolaires italiens, qui ne sont pas des centres d’autoformation, pouvaient difficilement fournir aux professeurs les formations nécessaires pour adapter leurs pratiques en présentiel à un déroulement totalement à distance et notamment pour pratiquer la production orale. Or c’est sans doute précisément pour cette compétence que le manque de présence physique est susceptible de nuire aux apprentissages.

2.2 Distance/présence lors de la crise sanitaire : perception du manque de présence

Croze (2021) a récemment publié l’une des premières études concernant la perception de la distance par des enseignants de langue lors de la première vague pandémique de 2020. L’approche exploratoire qualitative et en partie quantitative adoptée par la chercheuse a pour objet d’enquêter sur le manque de présence physique dans les dispositifs mis en place par les académies pour assurer la continuité pédagogique. Avant de faire état de ses résultats, l’auteure fait le point sur la littérature abordant la question de la présence/distance. Nous reprenons ici ses observations et ses références.

En premier lieu, Croze souligne que la présence peut exister aussi bien en situation de face à face physique qu’en situation de distanciel, grâce aux affordances7 ergonomiques et sociales des outils numériques utilisés : les affordances ergonomiques désignent ce que les propriétés apparentes des artefacts disent de leur fonctionnalité et des actions qu’elles permettent de la part des utilisateurs qui s’adaptent à la forme des objets numériques pour en exploiter concrètement les fonctionnalités8 (GIBSON, 1975). Au-delà de l’appropriation des objets numériques (affordances technologiques), la littérature en Interface Hommes-Machines souligne la nécessité de se saisir des affordances sociales de ces mêmes objets :

Les affordances sociales sont des propriétés des environnements d’apprentissage collaboratif supportés par l’ordinateur qui agissent comme des facilitateurs sociaux contextuels pertinents pour les interactions sociales des apprenants.

KREIJNS et KIRSCHNER, 2001 : 14.

En effet, l’interaction enseignant-apprenants et l’interaction entre pairs constituent l’une des spécificités de la didactique des langues. Elle en est en fait la condition sine qua non. Or la présence physique favorise évidemment la multimodalité corporelle (CICUREL, 2002), également interprétée comme “parole totale” (COLETTA, 2004), à savoir la possibilité de donner à voir la totalité du corps et les mouvements qui contribuent à la distribution de l’interaction mais aussi à la gestion kinesthésique de l’imprévu en classe de langue. Cependant, si à distance, la visioconférence permet de faire voir les corps, Croze fait observer que seule la partie supérieure est révélée, ce qui altère sensiblement l’ensemble du répertoire corporel utilisable pour gérer les interactions mais aussi pour assurer le lien psycho-affectif dans la relation pédagogique. Enfin, un autre élément impossible à faire prendre en charge par la machine, est la fonction “haptique” : 

Le partage commun de “l’ici et maintenant”, modèle principal de la relation humaine, se transpose ainsi dans l’espace et devient la référence de la communication à distance. Ce partage, on le sait, ne se limite pas à l’échange de signes verbaux et non verbaux. Il est tissé de gestes, de contacts corporels concrets ou potentiels et de manipulations conjointes d’objets. Cette dimension “haptique” (du grec “haptein”, toucher) lutte contre l’affadissement inévitable d’une communication contrainte à ne s’extérioriser que par le texte, le son, l’image sans pouvoir s’appuyer sur une interaction corporelle, directe ou indirecte. L’enjeu n’est alors plus seulement communicationnel, mais relationnel. Il ne s’agit plus de transmettre des informations mais de créer les conditions d’un partage mutuel d’un univers.

WEISSBERG, 2006 (en ligne)

Comment compenser en distanciel ces carences corporelles ? Quel ressenti chez les enseignants qui ont dû improviser lors du passage au distanciel, sans formation préalable et pour la plupart sans guidage in itinere, une continuité pédagogique potentiellement difficile pour les raisons que nous venons d’exposer ? Dans les résultats de son enquête, Croze relève que les enseignants ont souffert de ne pas pouvoir percevoir correctement les réactions de leurs élèves et de ne pas pouvoir adapter le cours par rapport à l’imprévu et donc de ne plus disposer des stratégies corporelles et physiques possibles pour intervenir en rétroaction. En somme, c’est surtout le couple corporéité totale-interactions qui est mis à mal en distanciel, avec l’absence quasi totale, dans les réponses des praticiens, d’interactions orales, de questions de la part des apprenants, la disparition de la dimension expérientielle et l’impossibilité de résoudre collectivement des problèmes par touches successives. Enfin et surtout, selon l’auteure, le passage à distance ne permet plus d’assurer le lien affectif, notamment avec des élèves en situation de détresse sociale et familiale.

En termes d’interprétation des résultats, Croze souligne une possible “non-perception des affordances des artefacts (…) en lien avec la formation insuffisante des enseignants à la mise en œuvre d’une didactique médiatisée par le numérique”, faisant observer que les outils de visioconférence, ont été peu investis d’après les réponses fournies par les enseignants au questionnaire. En fin de compte, en France comme en Italie, le désarroi des praticiens révèle l’absence d’une formation solide qui leur permettrait de compenser en partie les pertes de lien, de corporéité, aggravées par les dysfonctionnements techniques, les inégalités en équipement mais aussi par la perte de perception chez les élèves du caractère obligatoire de la présence en cours. Dans certains cas, certains enseignants, habiles avec les technologies (très probablement parce qu’ils les utilisent déjà en renforcement du présentiel enrichi), sont parvenus lors de la pandémie à exploiter les affordances des outils numériques, à proposer des tâches en interaction et à gérer le moral en berne de leurs élèves.

Contrairement à l’article de Croze, qui pointe les carences de la présence en distanciel, nous ne disposons pas encore suffisamment d’articles convergents qui mettent l’accent sur les réussites de ces enseignants du secondaire qui ont (bien) utilisé la visioconférence et la palette d’outils accessibles pour proposer des tâches porteuses d’interaction en modalité de classe inversée. La formation proposée par le Do.Ri.F et la Fédération des Alliances Françaises d’Italie avait justement comme objectif de tenter de contribuer à la recherche d’outils et de stratégies utiles pour mieux gérer l’“absence de présence” corporelle, ne serait-ce qu’en partie. Cela nous conduit à esquisser un panorama des offres actuelles de formation et à esquisser les lignes de force d’une formation de formateurs à la FAD.

3. Les formations à la FAD

En Italie, en ce qui concerne la formation initiale des futurs enseignants de langue vivante, il est assez difficile de trouver un programme-type de formation. Très globalement, le parcours habituel est l’obtention d’un master 2 en lettres et langues étrangères correspondant peu ou prou aux filières françaises Langues Littérature et Civilisations Étrangères et Régionales (LLCER) ou aux filières de langues étrangères appliquées (LEA). Lors de ce ces formations, des modules de didactique des langues sont proposés mais le repérage d’éventuels modules spécialisés dans la didactique des langues étrangères à distance conduirait à effectuer une longue, minutieuse et méthodique recherche qui dépasserait les ambitions du présent article. Cependant, à titre indicatif, en analysant quelques programmes de cours de master9 (Laurea Magistrale) en didactique des langues, nous avons pu constater l’absence de toute mention de la FAD. Il ne semble pas non plus exister, à notre connaissance, de formations initiales spécifiques qui y soient entièrement consacrées, que ce soit pour les langues ou d’autres matières. Nous sommes donc en présence d’un champ de formation en voie de construction et de structuration.

Il existe en Italie des formations au rôle bien spécifique de tuteur mais il s’agit d’un métier distinct, différent des profils d’enseignants qui doivent assumer ce rôle dans le cadre de leur fonction. En ce qui concerne les enseignants déjà en poste, des formations transversales payantes et gratuites sont proposées par des organismes privés (éditeurs de manuels10), des organismes associatifs ou ministériels11. Pour la formation continue en didactique du FLE à distance, hormis les Ateliers FLE du Do.Ri.F et de la Fédération des Alliances Françaises, l’offre de formation de formateurs sur internet apparaît peu présente, probablement parce que les informations sont diffusées par le biais de circuits propres aux établissements. Ce manque d’informations sur la Toile ne signifie pas forcément que les autres associations ou structures ministérielles ne se sont pas engagées auprès des praticiens pour les aider à mieux utiliser les outils d’enseignement à distance. En effet, depuis de nombreuses années, l’ANILS (Associazione Nazionale Insegnanti Lingue Straniere) et le LEND (Lingua e Nuova Didattica) œuvrent de concert avec l’INDIRE (Istituto Nazionale Documentazione Innovazione Ricerca Educativa) pour former les enseignants à l’utilisation des outils numériques en présentiel enrichi, qui ont pu contribuer, comme nous l’avons souligné plus haut, à l’appropriation des outils utilisés en présentiel quasi inexistant.

En ce qui concerne l’enseignement à distance subi du fait de la crise sanitaire, les besoins sont importants en termes de gestion de la motivation, de conception de tâches stimulantes, de méthodologie dans l’utilisation des outils permettant de viser l’ensemble des compétences, qu’il s’agisse de réception, de production ou des dimensions civilisationnelle et interculturelle.

Compte tenu de la modalité de déroulement de la formation, les bases théoriques qui ont conduit la Fédération des Alliances Françaises et le Do.Ri.F à établir le programme des ateliers FLE consacrés à la FAD reposent sur les principes suivants :

  • nécessité d’articuler cadre théorique et pratiques en fournissant un cadre méthodologique solide, notamment en termes de progression ;
  • substrat théorique socioconstructiviste orienté sur la réalisation de tâches conçues pour les apprenants dans une perspective collaborative ;
  • réflexivité sur les choix de conception des tâches d’apprentissage, les modalités de déroulement, les résultats obtenus chez les apprenants et leur motivation ;
  • approche interactive et active ;
  • mise en évidence du potentiel des outils présentés (conception et utilisation des tâches langagières) pour les interactions orales et écrites.

Sur le plan théorique, l’expérience de la formation et la réflexion rétrospective que nous proposons dans le présent article nous amènent à mettre en évidence deux axes de recherche qui gagneront à faire l’objet d’études approfondies (ne se limitant pas à des questionnaires et des statistiques mais intégrant des approches qualitatives poussées par le biais d’entretiens semi-directifs) : la notion de médiation des savoirs et les notions couplées de présence/distance avec les dimensions qui leur sont associées (corporéité, voix, dimension haptique).

Les principes que nous avons dégagés plus haut gagneraient ensuite à être formalisés sous la forme d’un référentiel spécifique de compétences pour l’enseignement des langues à distance. Des référentiels existent pour les compétences liées au numérique en présentiel enrichi en langues vivantes (le référentiel Compétice, le C2iee certifiant pour les enseignants de l’Éducation Nationale en France, un référentiel établi par l’Unesco12), mais à l’heure actuelle, il n’existe pas à notre connaissance de référentiel spécifique pour la FAD en langues vivantes. En somme, il reste encore beaucoup à faire, même si l’existant en FAD ou pour le présentiel enrichi permet de disposer d’une base solide. Retenons toutefois un dernier principe à même d’orienter la formation continue ou initiale des enseignants de FLE à la FAD : ces formations gagnent à se dérouler en partie à distance pour permettre la familiarisation des praticiens aux environnements et aux outils de travail à distance et en partie en présence pour marquer sur le plan réflexif les manques perceptibles lors du passage à distance.

4. Vers la mise en place d’une formation en FAD toujours plus centrée sur l’humain et la gestion des affects

Les deux années successives de crise sanitaire ont amené l’institution scolaire, les enseignants et les élèves à expérimenter, parfois dans la douleur et l’inconfort, un enseignement-apprentissage à distance subi, où, par la force des choses, des solutions de repli ont été improvisées, ce qui a permis de respecter au moins partiellement les programmes prévus. Il est certain que grâce aux formations préalables visant le présentiel enrichi, la familiarisation et même l’expertise de nombreux enseignants de langue du secondaire avec les outils numériques a pu considérablement faciliter l’appropriation des outils de communication à distance, avec parfois des résultats fort convaincants. Cependant, le passage à une modalité entièrement à distance suppose une adaptation complexe, même pour les enseignants qui sont à l’aise avec le numérique. Comme nous l’avons vu avec les premières formations à distance (les fameux cours par correspondance), le taux d’abandon peut déjà être significatif avec des formations conçues pour un déroulement à distance, des concepteurs de cours et d’activités formés et des tuteurs formés à la FAD. L’on peut donc se représenter les difficultés, les tensions et les frustrations introduites par une pédagogie improvisée dans l’urgence avec des praticiens pris au dépourvu, des parents stressés, des élèves qui décrochent…

Nous pouvons supposer qu’à terme, tout le monde finira par reprendre le chemin des salles de classe et que les enseignants retrouveront la craie, le tableau noir, les cahiers, les mouvements, l’accès à une voix non altérée par des connexions intermittentes mais qu’ils retrouveront aussi leur tableau blanc interactif, les tablettes et l’utilisation ponctuelle de l’ordinateur et d’Internet en classe de langue pour des projets créatifs et collaboratifs. Toutefois, cette expérience traumatique (le mot n’est pas excessif, pour d’autres raisons que des raisons purement didactiques) a conduit à mettre en évidence des concepts clés tels que celui de distance subie, de présence et à formaliser dans une certaine mesure ce qui fait la spécificité des apprentissages langagiers, qu’il s’agisse du français ou d’autres langues, à savoir le rôle de la corporéité dans les interactions et, justement la centralité de l’interaction, de la socialisation, des échanges interpersonnels dans la didactique des LE. À cet égard, il parait important de souligner que des dynamiques de solidarité ont vu le jour entre collègues par le biais de groupes Whatsapp ou Facebook. Cette entraide à distance entre pairs, entre praticiens d’établissements éloignés géographiquement, constitue sans doute un apport non négligeable qui ne se substitue en rien aux formations à la FAD mais qui met l’accent sur la nécessité de tisser des réseaux professionnels basés sur des logiques d’échange horizontales en renforcement des formations.

On peut donc espérer que ce qui a pu émerger d’une situation d’urgence conduira les établissements scolaires et universitaires à former de futurs formateurs en prévoyant des modules dédiés à la FAD en formation initiale (programmes de didactique en second cycle universitaire) et des formations spécifiques en formation continue, comme nous avons tenté de le faire avec les Ateliers FLE Do.Ri.F /Fédération des alliances car au-delà de l’urgence, pour renouer avec la mission de contribution à l’égalité dans l’éducation des premières FAD, les potentiels actuels d’interactions en ligne rendent possible la mise en place de formations partiellement ou totalement à distance pour des publics isolés ou facilitent l’accompagnement ponctuel d’élèves présentant des besoins éducatifs particuliers. Toutefois, avant toute chose, il est nécessaire de tirer un bilan de l’expérience COVID et d’esquisser un cadre précis, scientifiquement solide pour le déploiement d’une formation à la FAD qui mette l’humain au cœur des dispositifs.

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1 Pour l’université de Genève, Karsenti (2013 : 226) fait état d’un taux de réussite beaucoup plus élevé en présentiel (61, 3%) par rapport à la formation à distance (29,3%) et Glikman (2002 : 46) évoque sans donner de chiffres à l’appui des taux d’abandons et d’échecs qu’elle jugent inquiétants.

2Toutefois, il faudra encore un peu de recul, des données objectives et des témoignages pour avoir une idée plus nette des progrès qui ont été accomplis d’une année à une autre.

3Les finalités étaient avant tout mercantiles comme le souligne Glikman et les premiers dispositifs émanaient alors le plus souvent de sociétés privées.

4Pour un approfondissement sur la question, voir la partie “La législation sur la formation des adultes” dans l’ouvrage de Glikman.

5Ce taux d’abandon dans le cadre de formations conçues pour se dérouler à distance oscillerait entre 30% et 80%.

6Un état de l’art sur les référentiels de compétence pour l’utilisation didactique du numérique dépasserait largement le cadre de cet article et pourrait faire l’objet d’une recherche en soi. Toutefois, il paraît important de faire remarquer que ces travaux contribuent fortement, eux-aussi, à la structuration du champ de la formation à la FAD.

7Ce terme, emprunté au champ de la psychologie cognitive (Gibson, 1977) et des interfaces homme-machine, est très souvent utilisé lorsque l’on parle d’intégration et d’utilisation d’artefacts informatiques dans un cadre didactique (Van Lier (2000, 2002, 2004).

8 C’est par exemple le cas du lien qui modifie la forme du curseur pour appeler à l’action de cliquer.

9Nous avons exploré à titre d’exemples un petit échantillon de programmes proposés pour la didactique des langues (master) des universités de Rome 3, Turin, Bologne et Udine.

10 Sur le site Orizzonte Scuola, un certain nombre de formations est proposé mais pour la plupart il s’agit de formations orientées sur l’utilisation d’un outil spécifique sans fournir de cadre global. Aucune de ces formations ne fait référence à un cadre scientifique quel qu’il soit. https://www.orizzontescuola.it/coronavirus-materiale-didattico-online-ce-sete-di-condivisione-invia-il-tuo/

11Capsules vidéo proposées par l’Indire visant davantage le présentiel enrichi.

12Ce référentiel est publié au format pdf sur le site teachertaskforce.org à l’adresse : https://teachertaskforce.org/sites/default/files/2020-07/ICT%20Framework%20FR.pdf


Per citare questo articolo:

Yannick HAMON, « Problématiques émergentes de la FAD dans son développement historique jusqu’à la didactique d’urgence en situation de pandémie », Repères DoRiF,  Ateliers Didactique et Recherches,  n. 3 – Méthodologies de didactique et d’évaluation durant l’enseignement à distance, Fédération Alliances Françaises d’Italie et DoRiF Università, Roma, aprile 2022, https://www.dorif.it/reperes/yannick-hamon-problematiques-emergentes-de-la-fad-dans-son-developpement-historique-jusqua-la-didactique-durgence-en-situation-de-pandemie/

ISSN 2281-3020